Opération Epervier. Bras de fer: Marafa Hamidou Yaya en fait-il trop?

Parfait N. Siki | Repères Lundi le 11 Juin 2012 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Au-delà du contenu des lettres de l'ancien Minatd, c'est l'impertinence de sa stratégie qui le place au ban et en adversaire irrévocable du système. Ses «camarades» pensent qu'il a franchi la ligne rouge.

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A sa quatrième lettre, la stratégie de Marafa Hamidou Yaya s'affine davantage. La Biyaïe en prend à chaque fois pour son grade, présentée par l'ancien Minatd comme un repaire de corrompus dépourvus du sens de l'Etat. Celui qui a aussi été SG/PR n'épargne par le président de la République, dont il veut mettre en évidence ce qu'il laisse apparaître comme les incohérences de la démarche et le paradoxe de la gouvernance: il aurait dû ne pas nommer un tel, il aurait dû agir comme ceci et non comme cela.

M. Marafa Hamidou Yaya tente de déshabiller le sérail, il veut démonter le système. Le roi doit être nu. Avec une opinion publique assoiffée d'informations, M. Marafa est devenu un héros médiatique facile, au point de créer une véritable «marafamania». Le public adore, mais s'il n'est pas toujours d'accord, la presse aime et en profite pour réaliser des tirages jamais atteints depuis quinze ans, les radios et les télévisions ne s'en lassent pas. Une certitude: les Camerounais ne regarderont plus la politique de la même manière et ne porteront pas le même regard sur leurs dirigeants.

La réaction des pontes du régime s'est fait attendre, au point de susciter des interrogations sur la mobilisation des hommes du Président pour cette cause. Ce temps d'attente était celui de la surprise et de l'assouvissement d'un vieux fantasme: M. Marafa a réalisé ce que de nombreux thuriféraires rêvent parfois de faire en secret, c'est-à-dire balancer pour faire bouger les choses dans un régime où il faut plus apprendre à se taire.

Alors il y avait à l'entame comme une jubilation bien dissimulée de voir le Chef recevoir en pleine figure des coups que peu ont osé lui donner en face. Et dès sa deuxième lettre, l'effet était garanti. Mais il y a eu une troisième, une quatrième et il y en aura certainement d'autres. S'ils se sont amusés des premières lettres, les notables du biyaïsme sont désormais sur les dents. Le sérail est en ordre de bataille contre M. Marafa, l'«élément perturbateur», le «trublion», le «félon». La levée de boucliers dirigée par M. Jacques Fame Ndongo est la face émergée d'un vrai front qui se construit pour décrédibiliser M. Marafa et le désillusionner d'une décadence du Renouveau.

Pour tous, l'ancien Minatd a violé les codes et franchi les limites. Sa faute: par sa description circonstanciée des tares du système, il démythifie le pouvoir et décrédibilise les fonctions républicaines. Pour les proches du Président, cela n'a plus rien d'un jeu, d'autant qu'à chacune de ses lettres, M. Marafa «inculpe» une ou deux personnalités supplémentaires dont il instruit le procès. «A ce rythme, il nous aura tous mis dans le même sac avant la fin de l'année», dit un ponte du régime.

Au fil du temps, comme un mauvais médicament, les attaques épistolaires de l'ex SGPR ont développé puis renforcé la résistance des anticorps du système. Un instinct de conservation traverse donc les proches du Président, qui savent que leur survie passe par une victoire sur cet adversaire qu'ils n'attendaient pas forcément, qu'ils redoutent, mais qu'ils ne sous-estiment plus.

«Passé l'effet de surprise, je peux vous dire que le pouvoir n'est pas ébranlé. Il ne fait pas que résister, il peut aussi attaquer en utilisant les mêmes armes que M. Marafa», poursuit notre source. La sortie de M. Fame Ndongo, suivie d'un envahissement anti-Marafa des médias, montre que la capacité de réaction du pouvoir n'a pas encore été totalement déployée. La première salve de défense ressemble à une manœuvre d'intimidation, mais qui tend surtout à rappeler où est le pouvoir et qui le détient.

Au demeurant, on perçoit une volonté du système de ne point laisser la situation déraper. Alors il répète que l'arrestation de M. Marafa est une question de droit commun: dans l'affaire de l'achat manqué du BBJ-II, c'est à la justice de dire s'il est responsable, coupable, complice ou innocent.

Président du MDR (Mouvement démocratique pour la défense de la République), lui-même ancien ministre d'Etat, M. Dakolé Daïssala, originaire de l'Extrême-Nord, tend à tout relativiser. «A mon humble avis, l'affaire Marafa liée à l'achat manqué d'un avion présidentiel est un non-événement. En effet, les mêmes causes produisant les mêmes effets, on n'aurait pas compris que le quidam soit en liberté alors que d'autres citoyens cités dans la même affaire croupissent en prison depuis quatre ans. Seule une mauvaise gestion de cette affaire conduirait à des dérapages non désirés», déclare-t-il.

Au rang des dérapages éventuels, l'idée de retirer à M. Marafa sa liberté d'expression ou celle d'empêcher les journaux de publier ses lettres. Jusqu'ici, le pouvoir n'a pas franchi le pas, il a compris que c'est l'erreur à ne pas commettre.


 

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