Cameroun - Agriculture. Cameroun - Conflits Agropastoraux: Quand pasteurs et agriculteurs s'étripent pour la terre

Laurent Gaïveneme | L'Oeil du Sahel Vendredi le 31 Janvier 2014 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
L'occupation des espaces réservés aux cultures agricoles et au pâturage à L'origine des conflits entre éleveurs et agriculteurs au Nord-Cameroun.

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La saison agricole 2013 tire à sa fin. Ce 25 novembre 2013, dans la zone agricole de Bamdake, chef-lieu de l'arrondissement du Mayo-Hourna, au nord de la Bénoué, les agriculteurs n'ont pas le sommeil tranquille. Dans cette bourgade, dès l'aube et ce jusqu'au coucher du soleil, des familles entières s'activent dans les champs. Hommes, femmes et enfants passent d'interminables heures à récolter et à sécuriser le fruit de leur dur labeur. Sous le soleil ardent, ils arrachent les pieds d'arachide, entassent des épis de mil sous des arbres, autres abris et hangars de fortune. Ils y disposent également leurs récoltes d'arachide, de niébé et de coton. L'objectif ici est de récolter au plus vite et de ne pas se faire surprendre par «des pasteurs peuls véreux, rusés et belliqueux; prêts à tout pour engraisser leurs bêtes», regrette Bayang, originaire du Mayo-Danay et installé dans la région du Nord.

Pour la plupart de ses compères Mafa, Moufou, Kapsiki, Toupouri, Guiziga et Massa, originaires de la région de l'Extrême-Nord et réputés pour leur endurance, l'heure n'est pas au répit; «C'est la course contre la montre», indique Kaladzavaï. «En cette période cruciale et d'abondance, les travaux agricoles consistent à collecter les céréales, le mil, le maïs, le riz, les tubercules, le niébé et à faire des provisions de légumes pour les femmes. Nous cueillons, fauchons et arrachons nos récoltes et les charrions à l'abri, dans des lieux de stockage provisoires. Nous les transporterons ensuite dans nos villages pour les entreposer dans les greniers, hangars et magasins pour la consommation de la famille. C'est vrai qu'une partie de nos, récoltes sera vendue pour parer à certains besoins», ajoute Moussa.


SOUS PRESSION

Avec ses sept enfants dont cinq en âge scolaire et qui ont déserté les classes depuis une semaine pour prêter mains fortes à leurs parents, la main-d’œuvre vaut son pesant d'or. En effet, essentiellement manuelles, les opérations de récoltes de coupage, liage en gerbes, de tassage pour compléter le séchage et d'assemblage dans les points de battage nécessitent une main-d’œuvre abondante. «Pour être performant, nous avons développé la "sourga" (solidarité communautaire qui consiste à fixer des jours de travail rotatif chez des membres d'un groupe, Ndlr)», explique-t-il. Il s'agit de mobiliser tous les bras disponibles au niveau d'une communauté.

Dans le village voisin, à Bamanga, à une dizaine de km de là, deux jeunes bergers postés à la lisière d'un champ d'arachide veillent sur leur troupeau de bœufs qui se régale en avançant, têtes baissées. «Vous voyez, ils nous mettent la pression. Là, ils font semblant d'être très occupés à sur¬veiller leurs bêtes. En fait, nous n'arrivons même plus à récolter tous nos produits. À peine nous avons avancé qu'ils sont là derrière nous. On ne peut pas travailler en paix», raconte Fanta, une veuve. Elle explique qu'il v a quelques années, elle a eu la désagréable surprise de constater que son champ, récolté à moitié la veille, avait été ravagé par un troupeau de bœufs. Des bergers insouciants avaient fait paître leur troupeau dans son champ.

Dans ces vastes espaces récoltés et dépouillés de toutes leurs richesses, les résidus, feuilles, coques, pailles, foins, racines et autres légumineuses s'étalent à perte de vue. Ces déchets constituent le plat préféré des bœufs, moutons et Chèvres. Une situation qui est à l'origine de nombreux conflits entre éleveurs et agriculteurs. En réalité, dans ces zones agricoles et fourragères, la cohabitation entre éleveurs et agriculteurs n'est pas toujours saine. Des dégâts causés par les bœufs dans les champs sont régulièrement la cause des altercations et des bagarres rangées entre agriculteurs et éleveurs dans les villages. Elles conduisent parfois à des blessures et même à la mort d'hommes, car les bergers sont le plus souvent armés. L'on assiste aussi à une espèce de vendetta entre les deux parties belligérantes qui se résume à des vols de bœufs ou à des destructions de cultures. «Le constat est que les conflits agro-pastoraux sont une réalité constante en zone rurale. Aucune année ne passe sans qu'on enregistre des pertes en vies humaines ou des personnes gravement blessées suite aux altercations entre agriculteurs et éleveurs, pourtant ces deux catégories sociales sont condamnées .à vivre ensemble comme la langue et les dents dans la bouche et de partager la même ressource qui est la terre», explique Jérôme Njabou de l'Organisation catholique allemande pour l'Assistance au développement (Ageh). 

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