Un discours de souveraineté sur le terrain symbolique
Le ton était ferme, le message sans ambiguïté. Lors d'une visite à la mine d'uranium de Somaïr, le Général Abdourahamane Tiani, président du Niger, a martelé un principe : "Le Niger a le droit légitime de gérer ses ressources naturelles et, conformément aux lois du marché, de les vendre de manière indépendante à ceux qui souhaitent les acheter." Une déclaration relayée par la chaîne nationale Télé Sahel, qu'il a qualifiée de "non discutable".
Ce discours intervient dans un contexte de bras de fer juridique et économique intense avec l'ancien partenaire historique, le groupe français Orano. En juin 2024, Niamey a révoqué le permis d'exploitation d'Orano, avant de nationaliser, un an plus tard, Somaïr, exploitant de la seule mine d'uranium en activité du pays. Une décision radicale qui a conduit la multinationale française à porter l'affaire devant le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (Cirdi). Ce tribunal a temporairement gelé, en septembre dernier, les ventes d'uranium nigérien, à la demande d'Orano.
Orano dénonce, Niamey persiste
La réaction française ne s'est pas fait attendre. Dans un communiqué daté du 27 novembre, Orano a condamné avec vigueur l'envoi d'une cargaison d'uranium depuis la mine de Somaïr, l'assimilant à une exportation illégale. La compagnie affirme avoir été empêchée d'exporter plus de 1 000 tonnes de concentré d'uranium, d'une valeur estimée à plus de 170 millions d'euros, en raison des actions des autorités nigériennes.
Mais Niamey, porté par une rhétorique souverainiste et une volonté affichée de "réexaminer en profondeur" l'exploitation de ses ressources par des entreprises étrangères, semble déterminé à passer outre. La visite présidentielle sur le site minier et les déclarations qui l'ont accompagnée envoient un signal politique fort : le Niger entend reprendre le contrôle total de son sous-sol.
Des enjeux économiques et stratégiques majeurs
Les chiffres soulignent l'importance de la manne. Selon l'Association nucléaire mondiale, le Niger représentait environ 4% de la production mondiale d'uranium en 2022. Pour la France, l'enjeu est stratégique : selon les données d'Orano reprises par Le Monde, l'uranium nigérien couvrait, avant la crise, environ 15% des besoins de son parc nucléaire, lequel produit 65% de l'électricité hexagonale.
Le conflit dépasse donc le simple cadre commercial. Il incarne la volonté des nouvelles autorités nigériennes, issues du coup d'État de juillet 2023, de redéfinir les termes des partenariats hérités de la période post-coloniale. En s'attaquant de front à un symbole historique de la présence économique française, le régime du Général Tiani affirme sa nouvelle orientation politique et cherche, peut-être, à nouer d'autres alliances sur le marché global des matières premières.
La balle est désormais dans le camp des tribunaux internationaux et des chancelleries. Mais à Niamey, le message est clair : l'ère des ressources gérées depuis l'extérieur est révolue.
Niger vs. Orano: President Tiani Asserts "Legitimate Right" to Sell Uranium on International Market
Defying France and international legal proceedings, Niger's President Abdourahamane Tiani has forcefully reaffirmed his country's right to freely dispose of its natural resources, particularly its uranium. This striking declaration was made on the very site of the Somaïr mine, the former subsidiary of French group Orano recently nationalized by Niger.
A Sovereignty Speech on Symbolic Ground
The tone was firm, the message unambiguous. During a visit to the Somaïr uranium mine, General Abdourahamane Tiani hammered home a principle: "Niger has the legitimate right to manage its natural resources and, in accordance with market laws, to sell them independently to those who wish to buy them." A statement broadcast by the national channel Télé Sahel, which he called "non-negotiable."
This speech comes in the context of an intense legal and economic tug-of-war with the historic former partner, the French group Orano. In June 2024, Niamey revoked Orano's operating license, before nationalizing Somaïr a year later, the operator of the country's only active uranium mine. A radical decision that led the French multinational to take the case to the International Centre for Settlement of Investment Disputes (ICSID). This tribunal temporarily froze Niger's uranium sales last September at Orano's request.
Orano Denounces, Niamey Persists
The French reaction was swift. In a statement dated November 27, Orano vigorously condemned the shipment of uranium from the Somaïr mine, equating it to illegal export. The company claims to have been prevented from exporting over 1,000 tonnes of uranium concentrate, valued at more than €170 million, due to the actions of the Nigerien authorities.
But Niamey, driven by a sovereigntist rhetoric and a stated desire to "thoroughly re-examine" the exploitation of its resources by foreign companies, seems determined to push ahead. The presidential visit to the mining site and the accompanying statements send a strong political signal: Niger intends to regain full control of its subsoil.
Major Economic and Strategic Stakes
The figures underscore the importance of the windfall. According to the World Nuclear Association, Niger accounted for about 4% of global uranium production in 2022. For France, the stakes are strategic: according to Orano data reported by Le Monde, Niger's uranium covered, before the crisis, about 15% of the needs of its nuclear fleet, which produces 65% of the country's electricity.
The conflict thus goes beyond a mere commercial dispute. It embodies the desire of Niger's new authorities, who came to power following the July 2023 coup, to redefine the terms of partnerships inherited from the post-colonial period. By directly challenging a historic symbol of French economic presence, General Tiani's regime is asserting its new political direction and may be seeking to forge other alliances on the global commodities market.
The ball is now in the court of international tribunals and foreign ministries. But in Niamey, the message is clear: the era of resources managed from abroad is over.
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Moussa Nassourou