Cameroun - Musique. Cameroon: Universal Music Africa, quel leurre !

cameroun24.net Vendredi le 20 Décembre 2019 Culture Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Il y a une dizaine d’années, alors qu’il écrasait littéralement la scène musicale camerounaise et qu’il s’offrait un passage remarqué à Londres, Petit Pays moquait en privée la déchéance musicale d’un certain Ben Decca lit-on dans les colonnes du journal Le Jour.

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« Mais il joue pour une bouteille de champagne à Douala », m’avait-il confié au détour d’une conversation. Depuis, le temps a passé. Ben Decca s’est offert une seconde jeunesse en flairant le bon coup aux cotés de la talentueuse Daphnée (Ndolo 2014) avant de revisiter ses gammes voluptueuses dans un slow qui a mis tout le monde d’accord (Aimer).
Pendant ce temps, notre Turbo national tanguait avant de ruminer les déboires d’un accident de moto qui a failli le précipiter dans l’au-delà. « La vie et ses revers », me diriez-vous. Car ce Ben Decca se porte si bien qu’il vient de s’offrir un contrat (franchement venu d’ailleurs) avec Universal Music Africa. Universal Music, pas moins. De quoi a priori faire pâlir d’envie tout artiste africain en mal de reconnaissance et en proie à la précarité. Universal Music Africa, le nouveau must de la musique africaine ? Pas si sûr.

 

Arrivée en grandes pompes il y a une décennie sur un marché africain de la musique en pleine mutations, la filiale continentale de la Major tombée sous l’escarcelle de Vivendi a entrepris de signer des artistes à bout de bras. La volonté affichée était de relancer l’industrie de la musique africaine en offrant un certain confort (matériel) à ceux qui la produise. Il s’agissait de s’installer durablement sur une niche à fort potentiel. « D’ici dix ans, le marché africain de la musique sera plus grand que le marché européen », indiquait Olivier Nusse, président du directoire de la filière française d’Universal Music. Même si elle est encore embryonnaire à l’échelle mondiale (elle pèse 0,44% des 17,3 milliards de dollars), la musique africaine représente déjà 33,2 % du marché européen. Le constat d’Universal pour l’Afrique francophone est très rationnel : les africains adorent la musique, le taux de croissance du PIB est d’à peu près 7,5%, et celui de la population (jeune) est très élevé (320 millions aujourd’hui pour 850 millions en 2050).

Stratégie
Mieux encore, Il y a derrière cet intérêt croissant une stratégie du groupe Bolloré, propriétaire de Universal Vivendi qui veut renforcer sa présence en Afrique en s’appuyant sur la culture. Les salles Canal Olympia constituant l’un des autres segments de cette grande offensive. Pour se faire une place au soleil, Universal a donc sorti le chéquier. « Pour les camerounais les sommes sont assez intéressantes et peuvent aller jusqu’à des dizaines de millions de Fcfa, imaginez ce que ça représente dans notre environnement », souffle Mbengang Kini, un opérateur du showbiz national. Mimie, Mink’s, Charlotte Dipanda et Pit Baccardi ont ainsi été enrôlés avant que le vétéran Ben Decca (35 ans de musique) ne rejoigne les troupes. Pour quels résultats ? « Le bilan est carrément décevant jusqu’à présent insiste Kini. Je ne vois aucun de ces artistes qui ait vraiment progressé depuis son arrivée chez Unirversal », poursuit-il.

D’où la question de savoir si Universal Music Africa n’embrasse pas trop pour mal étreindre. « Ils ont signé trop s’artistes sur le continent. Leur priorité ce sont les grosses pointures de la musique africaine. Ils n’ont pas le temps à consacrer à nos artistes. Certains signent et attendent deux ans sans être produits. Entre temps ils perdent l’inspiration et leur côte sur le marché », argumente Timbo, un autre promoteur musical basé à Douala. Depuis deux ans, un artiste comme Tenor manifeste son désir de « délier les chaines » qui le lient à Universal. « Y’en a qui ont signé chez versal ou versaux je sais pas etc…et ont peur d’annoncer (y’en a qui veulent bien sortir (moi) mais y’en a qui doivent entrer) », a-t-il laconiquement posté sur son compte facebook il y a deux ans. « Si on dit qu’on veut donner une visibilité internationale à nos artistes Africains, pourquoi on n’applique pas les mêmes moyens de productions et de promotions que pour les artistes de « Mbeng » qui sont subitement devenus africains comme MHD. On vous dira que ce n’est pas le même marché, ni la même portée. Pourtant l’Afrique Francophone consomme aujourd’hui Dadju autant ou plus qu’on peut le consommer en Occident », s’emporte Timbo.

Les seuls vrais revenus de l’industrie de la musique africaine sont ceux du live et du parrainage des artistes par les marques. Mais même sur ce registre, il n’est pas sûr que Universal marque des points. « Mr Leo qui a été Brand Ambassador de ITEL, Orijin sans avoir besoin de Major, Alpha Better records a fait la magie? Stanley l’a été combien de fois ? Tenor avec Malta Tonic ça date de bien avant Universal », relativise Timbo.
Alors aller chez Universal d’accord, mais pour y faire quoi ? « Pour exister les artistes qui signent là-bas se contentent des featuring ou se dissimulent dans des groupes. J’ai l’impression qu’ils veulent juste empêcher les artistes talentueux d’émerger ailleurs. Un artiste comme Magasco a catégoriquement refusé le deal que lui proposait Pit Bacardi pour rentrer dans cette boite », se plaint encore Kini. Le cas de Ben Decca est sans doute différent. Cette légende de la musique camerounaise ne rêvent certainement plus de conquérir le monde en chansons. Le jolie cheque d’Universal pourrait bien suffire à son bonheur. Et s’il en veut plus, il pourrait bien…déchanter.

Par Hiondi Nkam IV

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