Cameroun - Logement. Répression foncière: 550 familles expropriées au nom de la présidence

Yannick Kenné | La Nouvelle Expression Mercredi le 05 Octobre 2016 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Les populations du «plateau Bikogo» aux confins de la truculente institution d’Etoudi sont sans nouvelles du processus d’expropriation engagé en 2014, encore moins des indemnisations y afférentes.

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Le 10 novembre prochain marquera deux années de disette. Deux années que les populations du «Plateau Bikogo», aux confins de la partie Nord du site actuel de la présidence de la République du Cameroun, demeurent dans l’expectative après le démarrage en 2014 du processus d’expropriation foncière engagé par les autorités administratives au motif des «travaux de constitution des réserves foncières à Yaoundé I et II, aux lieux dits Emana et Febe Village, dans le département du Mfoundi». Selon des chiffres du Collectif des victimes d’Emana, ce sont 550 familles Mvog-Melingui et Mvog-Mbitoua, occupant «provisoirement» le site du versant Lycée d’Emana déclaré d’utilité publique, qui attendent depuis belle lurette l’aboutissement du processus d’expropriation, assorti d’indemnisations y afférentes, alors que celui-ci a démarré en 1977 avec la construction au plateau d’Emana d’un nouveau palais présidentiel. Le projet tombé dans les oubliettes pendant plus de trois décennies est ressorti des tiroirs en 2014, donnant des lueurs d’espoirs aux populations autochtones en disgrâce.

Seulement, depuis la signature le 17 juin 2014 d’un arrêté préfectoral de l’actuel Préfet du Mfoundi, Jean Claude Tsila, instituant un sous-comité Ad hoc de supervision des travaux techniques relatifs à la sécurisation foncière de la zone présidentielle, suivie de la seule descente sur le terrain qui y eut lieu ce jour-là, les populations sont restées sans nouvelles des responsables en charge de ce dossier. Il incombait à la sous-commission d’organiser le recensement, l’identification des occupants actuels et de leurs bien ; de faire arrêter toutes constructions en cours sur le site. «Le 10 novembre 2014, le ministre signe un arrêté qui crée une commission à qui il est demandé de descendre sur le terrain faire le recensement des biens en excluant les maisons. Il demande de reconsidérer les espaces. Nous attendons toujours de voir ce que l’Etat nous réserve. Depuis 1977, les familles vivent dans une précarité ambiante. C’est des parents qui ne peuvent plus contrôler leurs enfants, c’est les divorces tous les jours, parce que les terres qu’on cultivait, on ne peut plus les cultiver. Vous pouvez même cultiver, mais vous n’êtes pas sûr de récolter. C’est tout le monde qui brandit la menace en nous rappelant tout le temps que c’est le terrain de l’Etat», s’épanche Désiré Tsongo Enyengue, porte-parole du Collectif des victimes d’Emana.

 

Hold-up ?

 

En effet, cet autre arrêté du ministre des domaines, du Cadastre et des Affaires foncières (Mindcaf), complète les dispositions de l’arrêté préfectoral et remplace la sous-commission Ad hoc par une commission sans en changer son contenu. L’arrêté ajoute à ses missions celles de délimiter et faire borner les terrains concernés (Emana et Febe Village) aux frais du Mindcaf ; de faire poser les panneaux indiquant le périmètre de l’opération aux frais du Mindcaf ; de constater les droits, évaluer les biens en cause et identifier leurs propriétaires et titulaires ; de constituer le cas échéant une sous-commission technique de trois membres au moins à l’effet d’expertiser les différentes catégories de biens (titres fonciers, cultures) et autres mise en valeur constatées sur le terrain concerné.

Les recommandations de l’arrêté ministériel sont hélas restées sans actions concrètes sur le terrain, à la grande désolation des populations expropriées du fait du titre foncier n°29388/Mfoundi qui annule même les titres fonciers préalablement existants. «Nous savons que les domaines sont les domaines de l’Etat, mais qu’on respecte les droits des autochtones. Avant que ce ne soit Yaoundé, c’était un village. Si c’est vraiment pour cause d’utilité publique, qu’on nous recase, et qu’on nous donne les moyens nécessaires pour survivre», plaide Désiré Tsongo Enyengue, et de poursuivre : «Plus d’une fois, nous avons saisi le ministre des domaines, nous avons même saisi l’Evêque Mbarga, pour lui dire que la communauté chrétienne est menacée, et qu’elle ne savait à quel saint se vouer. On se rend compte que ce n’est pas l’Etat au fond qui manœuvre, mais c’est certains membres du gouvernement qui veulent s’accaparer de ces terres». Les populations ont entrepris en vain des démarches pour leurs indemnisations auprès des autorités, et ont saisi l’occasion la semaine dernière d’une initiative d’une Ong, le Réseau national des habitants du Cameroun (Rnhc), porteur d’un plaidoyer sur les revendications des populations victimes d’évictions forcées à l’attention des autorités.  

 

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