Cameroun - Allemagne. Politique, Economie, Sport. L'offensive de l'Allemagne au Cameroun

Le Messager Vendredi le 24 Mai 2013 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Chaque visite d’un responsable du gouvernement d’Angela Merkel est couronnée depuis 12 mois par des contrats bruyants. Celle de son représentant personnel pour l’Afrique suit le même fil d’Ariane. Simple hasard de calendrier ou effet d’un lobbying gouvernemental ? Le dévoilement du nom de l’entraîneur sélectionneur de l’équipe nationale du Cameroun a été fait le soir du jour de l’audience qu’a accordée le président de la République du Cameroun à Günter Nooke, représentant personnel chargé de l’Afrique de la chancelière fédérale allemande. Volker Finke a été désigné au bout d’un processus marathon de sélection de l’entraîneur national de football A des plus opaques.

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Processus lui-même critiquable de par son opportunité puisque l’entraîneur en poste affichait un tableau de bord, des résultats sportifs plutôt positifs. Pour des raisons d’Etat que le ministre des Sports et de l’éducation physique a refusé de révéler au public, l’opération de recherche d’un entraîneur pour les Lions indomptables a débouché le 23 mai 2013 sur la nomination de Volker Finke qui ne figurait pourtant pas sur la short-list. Ce, quelques heures après le tête-à-tête entre le représentant spécial du chef du gouvernement allemand et la voix la plus autorisée camerounaise. Si dans les milieux sportifs, on voit derrière le choix porté sur M. Finke la main invisible de l’équipementier Puma, bien d’observateurs ne jugent pas anodin le timing des audiences de Günter Nooke et l’annonce du choix de Finke.

S’il y avait une corrélation entre ces évènements, on dira que l’Allemagne a remis ça. Même si on ne peut lui reprocher de quadriller le marché étranger. Car l’année dernière, on relevait dans les allées du pouvoir, le lobbying du gouvernement allemand qui s’était fait avec aplomb à l’occasion de la visite au Cameroun, du 15 avril au 18 avril 2012, du secrétaire d’Etat parlementaire allemand auprès du ministre fédéral de l’Economie et de la technologie. Ernst Burgdacher qui avait dans sa suite les principaux responsables de l’entreprise allemande adjudicataire du marché de la biométrie électorale l’a adoubée auprès de tous les officiels camerounais rencontrés (entre autres, le chef de l’Etat et le Premier ministre) et certainement auprès des membres du Conseil électoral d’Elecam avec lesquels il s’était entretenu à la résidence de l’ambassadeur d’Allemagne au quartier Bastos à Yaoundé le 16 avril 2012.

Lobbying

C’est également le jour de l’audience qu’accordait Paul Biya à Ernst Burgdacher qu’Elections Cameroon annonçait que c’est l’Allemand Gieseke und Devrient qui était retenu comme partenaire technique pour le marché des inscriptions sur les listes électorales adossées sur la biométrie. Ce, contre toute attente. Puisque ne figurant pas sur la short-list d’Elecam. La campagne de charme de l’Allemagne aura donc payé. Et pour en afficher la reconnaissance, le Cameroun a généralement attendu le jour de la présence sur son sol d’un des dignitaires de ce pays pour faire une annonce qui plait...

Sur place en Allemagne, on observe un nouvel engouement pour le Cameroun, en atteste le redéploiement important autour d’un homme-lige : le lobbyiste Stephan Stephan Liebing – membre du conseil de direction de l’Afrika Verein (organisation du patronat d’entreprises allemandes sur l’Afrique) et devenu président en fin d’année 2012. Que ce soit au cours de la visite d’Ernst Burgdacher, en avril 2012 que celle du ministre fédéral de la Coopération économique et du développement, Dirk Niebel en novembre 2012 et celle de Günter Nooke, cette semaine, sa silhouette a été aperçue à Yaoundé.

Membre du Cdu (parti des chrétiens démocrates) au pouvoir, il s’attèle, connaissant les méthodes de persuasion à la camerounaise à faire signer le retour en force de l’Allemagne sur le marché de la production, du service ou même du négoce de son pays. Illustration, l’Allemagne détient le record du nombre de hauts dignitaires d’un gouvernement étranger en visite au Cameroun depuis un an. Si on y ajoute les lauriers en termes de contrat, on dira que German is back in Cameroon!

Rodrigue N. TONGUE

Focal. Les retombées de la visite Günter Nooke

Selon des informations diffusées, les documents relatifs à la construction d’une usine d’engrais à Limbé dans le Sud-Ouest ont été signés par l’administrateur directeur général de la Société nationale des hydrocarbures (Snh), Adolphe Moudiki. Et pour le compte de la société allemande Ferrostaal GmbH, par son président directeur général, Klauss Leske et Frantz Henry Liburg, Senoir exécutive Manager Petrochimical Industry. Chief Tabetando, président de la Société EurOil a paraphé les documents pour le compte de cette filiale camerounaise de la société écossaise Bowleven.

Le projet est évalué à 1,5 milliards de dollars soit environ 750 milliards Fcfa, pour ce qui concerne la société allemande. Cependant le coût global de l’investissement dépasse 2,5 milliards de dollars (1250 milliards Fcfa). Toujours selon les mêmes informations, l’usine envisagée vise une production annuelle d’environ 600 mille tonnes d’ammoniac et 700 mille tonnes d’urée destinés au marché local et à l’exportation. Un investissement qui en dépit des obstacles, « redonne confiance et beaucoup d’optimisme quant à l’avenir des relations commerciales entre l’Allemagne et le Cameroun », confie Stefan Liebing.

Günter Nooke. «… il y a de plus en plus d’intérêts pour le Cameroun »

Entretien à bâtons rompus avec le représentant personnel chargé de l’Afrique de la chancelière fédérale allemande, Günter Nooke, au détour de la réception qu’offrait l’ambassadeur de la République fédérale d’Allemagne à l’occasion de sa visite en terre camerounaise, mercredi 22 mai 2013. Une rencontre conviviale à laquelle étaient conviés des hommes d’affaires camerounais et allemands, parmi lesquels des représentants, Stefan Liebing, président de l’Association des entreprises germano-africaines. Une « association d’entreprises allemande qui font ou voudraient faire des affaires en Afrique », selon ce dernier.

Dans les rangs des invités également le promoteur African Business information Bank, Tumenda F. Kennedy ; le ministre de l’Agriculture et du développement rural, Essimi Menye. C’est donc un hôte très heureux à savoir Dr. Klaus-Ludwig Keferstein, ambassadeur de la République fédérale d’Allemagne, qui a accueilli dans sa résidence à Bastos à Yaoundé, de nombreuses personnalités dont l’invité de marque, Günter Nooke. Lequel n’a pas caché son bonheur au regard de l’actualité liée notamment à la signature du pré-accord commercial pour la vente du gaz naturel par la Société nationale des hydrocarbures (Snh) à l’usine de production d’engrais chimiques en projet.

Peut-on avec vous faire le point des échanges avec les autorités camerounaises ?

Les deux derniers jours ont été très fructueux, couronnés de beaucoup de succès. J’ai rencontré le Premier ministre, le chef de l’Etat et plusieurs ministres. J’ai aussi assisté à la signature des termship entre Ferrostaal, la Société nationale des hydrocarbures et EurOil. Il y avait M. Stefan Liebing, président de l’Association des entreprises germano-africaines.

Depuis un certain temps, il existe un mémorandum d’entente. Après, il y a eu une étude de faisabilité – c’était la première phase de ce projet- qui a abouti sur le projet de construction d’une usine d’engrais près de Limbe (Sud-Ouest). Cette usine va transformer le gaz naturel en engrais. Si ce projet est réalisé, ce sera l’investissement le plus grand de l’Allemagne en Afrique. Ce projet est donc entré avec cette signature dans sa deuxième phase de réalisation. C’est également important dans la mesure où, cela peut servir de modèle aux petites et moyennes entreprises (Pme) allemandes et même d’une manière générale pour le secteur privé allemand. Lequel sera plus au courant, mieux sensibiliser sur les opportunités africaines. Parce que c’est connu, la présence d’un gros investisseur quelque part, attire souvent d’autres entreprises. Donc, j’espère que ce sera le cas et qu’il y aura ensuite de nombreux autres projets.

Quels sont les autres projets et domaines, où il y a une coopération entre l’Allemagne et le Cameroun ?

Günter NookeJe citerais par exemple le projet African Business information Bank de M. Tumenda F. Kennedy. Il s’agit d’une banque de données avec des informations sur des entreprises au Cameroun qui permettent aux entreprises allemandes d’en savoir plus et trouver des partenaires quand elles veulent investir dans un secteur donné. Dans cette banque de données, elles ont par exemple des informations sur l’activité de l’entreprise, sa fiabilité et crédibilité…) cette banque de données a aussi un volet formation et forme des jeunes à l’entreprenariat.

Je vois également des opportunités de coopération dans le domaine de l’énergie, l’agriculture. Avec mes interlocuteurs au cours de ces deux jours, nous avons parlé de l’initiative Aims-Next Einstein Initiative l'African Institute for Mathematical Sciences. C’est un réseau qui permet à des chercheurs de faire une spécialisation en doctorat dans les domaines de sciences. Il y a déjà des instituts dans plusieurs pays africains notamment en Afrique du Sud, Sénégal, Ghana et le prochain institut, on espère va être établi bientôt au Cameroun.

Avec quel message repartez-vous auprès de la chancelière ?

Je lui dirais certainement que pendant ma visite, j’ai constaté que l’Allemagne est la bienvenue au Cameroun. Que tous mes interlocuteurs ont été très accueillants. J’espère que l’usine d’engrais va être bientôt construite. Et que cette construction va servir comme modèle pour d’autres projets et investissements de la part de l’Allemagne. Je ferais sans doute connaître mon impression très positive sur le Cameroun. C’est un pays propice à l’environnement très agréable aux affaires.

Qu’est-ce qui peut expliquer ce revirement ? Il y a deux ans, en 2011, précisément vous déclariez dans les colonnes de certains confrères que le Cameroun n’est pas la priorité des entreprises allemandes.

Il faut simplement être conscient que beaucoup d’investissements allemands aujourd’hui sont faits en Asie. C’est dans ce sens que j’avais alors parlé de priorité. Les entreprises sont très orientées vers l’Asie parce que simplement, elles attendent beaucoup de revenus avec ces investissements. C’est dans ce sens que j’avais parlé de priorité. Mais les choses ont changé. De plus en plus de petites et moyennes entreprises allemandes commencent à s’intéresser au Cameroun. Elles comprennent désormais qu’il y a des opportunités ici. Il y a un changement de perspective, et l’image du Cameroun est positive en Allemagne.

Il y aussi le fait qu’il y a une diaspora assez grande de Camerounais qui vivent en Allemagne. Des Camerounais qui parlent allemand habitent ici. Il y a beaucoup d’échanges entre les deux pays et cela renforce l’image positive et la volonté des gens à s’engager dans le secteur privé, dans les investissements entre les deux pays. Donc c’est aussi grâce à cette communauté de la diaspora et les Camerounais qui parlent allemand que les liens se sont intensifiés. Et il y a de plus en plus d’intérêts pour le Cameroun.

L’Allemagne se positionne comme le meilleur modèle économique face à la crise qui sévit actuellement en Europe. Dans ce contexte, le Cameroun peut-il espérer que l’Allemagne lui tende la main notamment dans le cadre du transfert des compétences ?

En fait, la situation de l’Allemagne doit être comprise comme une longue histoire, une longue évolution qui a créé des structures économiques. Et pour avoir une économie qui marche, il faut un certain nombre de facteurs. Certainement, c’est une course de longue haleine, il faut avoir une monnaie stable et des gens qui prennent leur destin en main.

Propos recueillis par
Nadège Christelle BOWA
Le Messager

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