Lutte contre Boko Haram. Les leçons du double attentat-suicide de Maroua

RAOUL GUIVANDA | L’Oeil du Sahel Samedi le 25 Juillet 2015 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
10 jours après le double attentat-suicide de Fotokol qui a fait 14 morts et plusieurs blessés, la secte Boko Haram a encore frappé au Cameroun. Cette fois, c’est la ville de Maroua qui en a fait les frais.

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Le double attentat-suicide qui y a été perpétré a fait 15 morts et 31 blessés (bilan provisoire au moment où nous allions sous presse) dont 22 ont été conduits à l’hôpital régional et 10 à l’hôpital de Founangué pour recevoir des soins. Parmi les blessés, certains ont dû être amputés. Le double attentat-suicide a été perpétré par deux femmes. La première explosion est l’oeuvre d’une jeune fille d’à peine 13 ans.

Elle s’est fait sauter aux alentours de 14h20 au marché central, dans le secteur de la vente des tissus, non loin de la permanence du parti Rdpc. Son corps a été projeté dans une concession située non loin de la route, signe de la violence de la déflagration qui a fait sept morts sous le coup, dont la kamikaze. Les débris d’un téléphone portable ont été retrouvés sur les lieux de l’explosion, ce qui peut laisser sous-entendre qu’elle a été déclenchée par un appel téléphonique. «Je l’avais déjà aperçu par le passé, la petite fille kamikaze. Il lui est même arrivé de me demander à manger. J’ignorais qu’elle était capable d’une telle atrocité», explique Fada Halidou Ousmaila. «J’étais non loin de Laking textile quand l’explosion s’est produite. J’ai vu comment la bombe a projeté la fille kamikaze dans les airs », raconte pour sa part Abdoulkarim Lamine, vendeur de Kola à Maroua.

La seconde kamikaze, âgée d’environ 25 ans, s’est fait, elle, exploser au quartier Bamaré, non loin de l’immeuble de Yaya Bello qui abrite l’agence d’Ecobank. Selon des témoins, elle avait été aperçue dans la matinée, traînant dans les parages. «Elle faisait semblant de vendre des dattes et portait un lafaye jaune, une sorte de Burqa qui ne cache cependant pas le visage. Oui, elle n’était pas nette, mais comme les forces de sécurité trainaient dans le coin, nous n’avions aucune raison de nous inquiéter outre mesure», affirme Moussa qui tient une échoppe non loin du lieu de l’explosion. Outre le kamikaze, cinq autres personnes ont trouvé la mort sur le coup. «Je ne savais que pas la barbarie de Boko Haram avait ce visage. Je n’ai pas pu retenir mes larmes à la vue des morts du marché central. C’est tout simplement horrible», fulmine Bakoura Hamidou, commerçant au marché central de Maroua.

PANIQUE

La panique qui a gagné la ville de Maroua peu de temps après le double-attentat, dopée par la psychose ambiante née de la multiplication des mesures sécuritaires prises par les autorités administratives et les premiers attentats de Fotokol, était attendue. Heureusement, elle n’a pas duré longtemps. «Nous, les populations de Maroua, sommes choquées. Je sais aussi que le pays tout entier est choqué. C’est la première fois que cela se produit ici, mais la ville s’est ressaisie. Elle est digne dans la douleur, elle est courageuse dans l’épreuve», affirme le maire de Maroua 1er, Hamadou Hamidou, l’un des élus locaux les plus actifs au chevet des victimes.

Passés les premiers moments de flottements, la ville s’est reprise. La panique, la frayeur, ont cédé la place à la résistance. «Nous n’allons pas céder à la peur. Cette secte ne nous fera pas céder quel que soit le nombre d’attentats. Maroua doit rester debout, comme Fotokol hier, comme d’autres villes du Cameroun demain parce que la lutte contre le terrorisme est un long chemin de croix et qu’il y a un prix que le Cameroun doit payer, qu’il va payer certainement. Nous allons rester debout», explique Zourva Antoine, cadre d’une société de la place. Parmi les premières mesures édictées par les autorités : le rappel des médecins et autre personnel médical de la région à Maroua, et le lancement d’une vaste opération de contrôle pour débusquer les illégaux.

Le gouverneur de la région de l’Extrême-Nord, Midjiyawa Bakari, a également tenu une réunion de crise pour évaluer la situation et faire un premier bilan. «Pour le moment, nous dénombrons 13 morts, notamment 7 au marché et 6 au quartier Haoussa (Ndlr : au moment où nous allions sous presse, le bilan provisoire faisait état de 15 morts et 31 blessés). Parmi les morts, je viens de perdre ma domestique. Pourtant, mon épouse l’a interdit de sortir n’importe comment. Elle est partie retirer les vêtements de ses enfants. J’ai instruit les préfets afin qu’ils saisissent les maires pour qu’ils soutiennent la délégation de la Santé publique en rapport avec ses besoins», a-t-il affirmé en substance.

Pour la partie septentrionale du pays, la plus exposée aux attentats en raison de nombreuses circonstances, et pour le Cameroun tout entier, c’est une nouvelle épreuve qui commence. Elle sera douloureuse, longue, mais la seule arme c’est de lui faire face. En restant debout. «Ces quatre attentats, en l’espace de quelques jours, prouvent que des cellules dormantes ont pris pied sur le territoire, que les modes opératoires varient du jour au lendemain, déjouant les mesures des autorités, qu’il y aura sans doute de nouveaux attentats. La réponse, notre réponse, est de ne pas sombrer dans la psychose, la peur. Autrement, nous aurons été vaincus, sans avoir combattu. Camerounais, restons debout. Ils comprendront que nous ne plierons jamais, jamais», soutient un enseignant de lycée, rencontré au marché central de Maroua peu après l’attentat.
 

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