Sénatoriales 2013. Les dessous de désignation de Niat Njifenji au perchoir

Le Messager Vendredi le 14 Juin 2013 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Jusqu’à leur entrée au palais des verres de Ngoa-Ekelle, les sénateurs de la majorité ignoraient l’identité de celui qu’ils devaient élire.

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Le film des tractations au siège du parti. L’un des véritables points d’attraction de ce 12 juin 2013, date d’élection du président et du bureau du Sénat a été le palais des congrès de Yaoundé. Car s’y est tenue la réunion du groupe Rdpc, majoritaire à 82% à la chambre haute. La traditionnelle réunion de groupe parlementaire (calqué sur l’exemple de l’Assemblée nationale) vise à investir un camarade parlementaire comme candidat au poste de président et les autres, comme Premier vice-président et membres du bureau. Exceptionnellement, comme il s’agit d’une nouvelle législature, les sénateurs Rdpc doivent désigner en sus, le président, vice président et secrétaire de leur groupe au Sénat. L’agenda est donc bien chargé. Seulement à 13heures 30 passées, rien n’est décidé. Pourtant la plénière d’ouverture qui se tient au palais de Ngoa-Ekelle est prévue dans moins d’une heure trente. Heureusement, tous les parlementaires le savent, il n’y aura pas de débats, encore moins de casting. Le président national avisera ! Les causeries se poursuivent jusqu’à l’entrée du secrétaire général du Comité central du Rdpc. Jean Nkuété est suivi d’une forte délégation composée de secrétaires nationaux et conseillers techniques.

Après le sacrifice à quelques civilités, le patron administratif du parti du flambeau ardent passe la parole au président du bureau d’âge du groupe Rdpc pour d’autres civilités, puis au secrétaire national à la communication, Jacques Fame Ndongo. Celui-ci annonce que le président national a choisi Mafany Musonge comme président du groupe. Dans la foulée, les personnes présentes, parmi lesquelles figurent nos sources, apprennent que le vice-président est le sénateur Calvin Zang Oyono et le secrétaire, Marava Abdoulaye Wouyack.

Ferdinand Ngoh Ngoh

Tollé général. Mafany Musonge présenté par la presse comme grand favori ne sera pas président du premier Sénat du Cameroun. Ce sera donc qui ? Les noms de Mbombo Njoya, Madeleine Tjoues, René Zé Nguelé, Achidi Achu, Thomas Tobbo Eyoum reviennent. Dans la salle, les téléphones crépitent. De nombreuses personnalités, (ministres, gouverneurs, députés, préfets, journalistes et autres curieux veulent savoir). « Ce n’est pas Mafany Musonge », se contentent de leur répondre leurs interlocuteurs au bout du fil, lesquels sous des casquettes spécifiques ont le droit d’être en salle. Entre temps, le secrétaire général du Comité central a repris la parole pour indiquer que le président du groupe Rdpc fraîchement désigné le retrouvera à son cabinet, logé au 6e étage du palais des congrès pour recevoir le pli du président national renseignant sur l’identité du candidat investi par le Rdpc au perchoir. Les autres députés sont invités à décamper. Tout juste, Jean Nkuété les invite à la discipline en accordant «tous comme un seul homme, leurs suffrages à celui qui sera choisi». Sur ces entrefaites, la séance de travail est levée. Les sénateurs foncent vers le palais des verres sans savoir formellement celui qu’ils vont élire dans moins de deux heures. Tout comme ils ne le sauront pas jusqu’au moment où le président du groupe parlementaire Rdpc l’annonce à l’ensemble de l’Hémicycle en plénière après avoir retiré le pli du président national que le secrétaire général de la présidence de la République, Ferdinand Ngoh Ngoh est venu remettre personnellement à Jean Nkuété autour de midi. C’aurait donc été le secret jusqu’au bout. Le Messager n’a pas encore su si Niat Njifenji, lui-même, a été informé de la décision de Paul Biya avant les autres sénateurs de sa chapelle politique ou s’il la appris « la bonne nouvelle » au même moment que les autres Camerounais qui regardaient l’évènement à la télévision. Il redit en tout cas avoir été surpris… et donne l’air d’être sincère.

Décryptage. Le bureau du Senat au scanner sociogéographique
La composition du bureau du tout premier Sénat du Cameroun, à l’ère du Renouveau, appelle à constater des changements dans la répartition du gâteau national, les équilibres ethniques du pouvoir et des bouleversements dans le protocole de la République.

De la répartition du triangle à celle du carré
On était habitué au Cameroun, depuis l’avènement de l’Indépendance à un découpage triangulaire du visage de proue détenteur du pouvoir. Le président Ahidjo, musulman du Nord, s’arrangeait à faire émerger un francophone du Sud ou un anglophone comme deuxième et troisième personnalité du pays. Arrivé au pouvoir en 1982, Paul Biya a perpétué la tradition (avec quelques) rares exceptions en promouvant Bello Bouba Maïgari, Premier ministre et maintenait Salomon Tandeng Muna président de l’Assemblée nationale dans l’ancien parlement monocaméral. Autour des années de secousses sociales de 1990, le président va inverser le triangle en faisant remplacer Fonka Chang Laurence (anglophone) par Cavaye Yéguié Djibril (musulman du Nord) et quelques temps avant, Sadou Hayatou, Premier ministre originaire de Garoua par Simon Achidi Achu de la Mezam dans le Nord-Ouest. Le triangle isocèle devient rectangle, mais les équilibres musulman nordiste – francophone – anglophone sont maintenus.

On se demandait bien quelle figure géométrique allait avoir le protocole d’Etat au plus haut niveau avec l’avènement du Sénat, la demande du grand-nord à accéder aux poste exécutif de Premier ministre et la gestion de la transition au cas où… Le 12 juin 2013, à l’occasion de la composition du Sénat, on a bien compris que le chef de l’Etat a opté pour un carré dont les quatre lucarnes sont désormais, le grand-nord (peuls, musulmans, kirdis etc…) ; le Sud francophone (bantous) ; la zone anglophone et désormais l’Ouest (semi bantous). Telle sera la configuration, pour les jours à venir des sièges situés aux avant-postes, les jours des cérémonies présidées par le chef de l’Etat. Paul Biya au centre ; Niat Njifenji à sa droite, suivi du Premier ministre et Cavaye Yéguié Djibril qui passera à gauche… du moins jusqu’aux prochaines législatives qui modifieraient peut-être tout.

La part belle aux sénateurs nommés
La composition du bureau du Sénat laisse également penser que le chef de l’Etat a voulu une direction de la chambre qui correspond à ses choix directs. Car, Seuls 6 sénateurs élus le 14 avril 2013 sur les 70 (moins d’un dixième des effectifs) ont pu obtenir un poste au bureau de la chambre composée des 17 personnes. Pis, le président et le premier vice-président sont de personnalités nommées au Sénat par le président de la République en mai dernier. La voix des conseillers municipaux qui choisissaient le 14 avril, 70 sénateurs sera portée au niveau de la direction de la chambre par Géneviève Tjoues, Paul Tchatchouang (vice-présidents) Fon Teche Nje II, Marie Claire Mompéa, Madeleine Haoua (Secrétaires) et Njifua Fontem (questeurs). Pour le reste, ce sont 11 personnalités nommées sur les 30 (plus d’un tiers des effectifs) qui conduiront jusqu’en mars 2014, le Sénat. On n’est pas loin d’un gouvernement donc !

Les sénateurs Sdf de l’Adamaoua boudent
Tout le monde l’a remarqué. Les sénateurs du Social democratic front (Sdf) ont accusé 25 minutes de retard sur le début de la plénière d’élection du bureau de la chambre haute du parlement camerounais. Officiellement, les cadres du parti de John Fru Ndi l’expliquent par une réunion marathon d’état major qui aura duré plus que le temps imparti. Cette version des faits est partielle. Puisque de sources crédibles, Le Messager a appris qu’effectivement, les discussions au cours de ladite réunion ont achoppé sur la question de la représentation du « parti de la balance » au bureau du Sénat. En effet, les 7 sénateurs Sdf de l’Adamaoua menaçaient de ne pas entrer à l’hémicycle ou le cas contraire voteraient pour les candidats du Rdpc au perchoir de même qu’à la première vice-présidence si un des leurs n’étaient pas investi comme candidat au bureau ou simplement désigné président du groupe Sdf au Sénat. C’est au bout de longues négociations qu’on aura obtenu des sept de l’Adamaoua de se plier au choix de John Fru Ndi qui a fait de Tsémoulou, sénateur de l’Ouest, le président du groupe et Paul Tchatchouang, sénateur de l’Ouest toujours, un des vice-présidents du Sénat. L’Adamaoua se sera contentée de Madeleine Haoua, comme secrétaire. Ce qui fait froncer les visages dans les rangs des 7 sénateurs Sdf de la région « château d’eau du Cameroun ». On peut comprendre pourquoi un des sénateurs Sdf a violé la consigne de vote blanc pour l’élection du Premier-vice président en accordant son suffrage à Aboubakary Abdoulaye élu premier vice-président avec 87 voix alors que Niat Njifenji n’aura obtenu que 86. Soit 100 moins 14 du Sdf.

Fscnc et Andp out !
Les uniques sénateurs respectifs du parti d’Issa Tchiroma et celui d’Ahmadou Moustapha ne siègeront pas au bureau de la chambre, alors que le règlement intérieur le leur garantit. En effet, le texte promulgué le 11 juin dernier dispose que tous les partis politiques représentés au Sénat soient également représentés dans la mesure du possible au bureau… à moins qu’ils ne le désirent pas. Est-ce à dire que Hamadou Abbo (Fsnc) et Marlyse Aboui (Andp et membre du bureau d’âge) n’ont pas souhaité faire partie du bureau de la chambre haute du parlement? En tout cas, il n’y a que ce cas de figure qui puisse l’expliquer.

Rodrigue N. TONGUE
 

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