Cameroun - Femme. Le 8 mars des femmes ! Suzanne Kala-Lobè

La Nouvelle Expression Mardi le 05 Mars 2013 Opinion Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
La 28ième célébration de la Journée Internationale des Femmes au Cameroun, arrive à un moment où les violences que subissent les femmes et les jeunes filles ont connu un degré inouï de cruauté avec l’affaire des crimes rituels de Mimboman un quartier de Yaoundé, capitale politique du Cameroun) au mois de janvier dernier.

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Ces crimes ont principalement concerné que des jeunes filles augées de 15 à 25 ans. On les a dépecé comme des animaux, On leur a non seulement volé leur vie, mais on a aussi désossé leurs corps.


Pourquoi les a-t-on appelé «crimes rituels» ? Toute la question est là. Car il est possible que cette seule caractérisation, n’oriente les recherches que vers la localisation de boucs émissaires en occultant la signification sociétale de ce type d’agression sexuelle abusive dont la violence contre les femmes a atteint les sommets . Car ces crimes sont indiscutablement des violences instituées contre les femmes dont le niveau de cruauté a atteint un summum, qui doit interroger la société camerounaise. Il ne s’agit pas seulement de constater que ces crimes sont commandités par des hommes ou peut-être des femmes qui désirent s’enrichir à tous prix, mais de se focaliser sur le statut des victimes : pourquoi des femmes ? Pourquoi des enfants ? En s’intéressant aux victimes on pourra alors avoir une idée de la manière dont les femmes sont perçues dans une société qui n’arrive pas à se défaire de son machisme structurel, malgré la percée spectaculaire des femmes dans des postes de responsabilité... Civile et politique et... économique !!


Le thème de cette 28ièmejournée, à savoir : «élimination et prévention de toute forme de violence à l’égard des femmes et des jeunes filles», indique bien l’importance du phénomène ! On pourrait dire qu’il tombe à pic avec cette insoutenable actualité sur des corps de femmes sans organes qui dévoile et met à nu, les dérives d’une société sans repères ni boussole et où les femmes sont les premières victimes exposées aux vicissitudes des hommes.
Ce 8 mars des femmes, tombe un vendredi. Mais ces 28 ans de célébration, d’une journée internationale, qui est précédée par de nombreuses manifestations devraient être aussi le temps d’une évaluation : où en sont les luttes des femmes pour leurs droits ? Où en est la femme camerounaise ? Comment se sent-elle et pour qui se prend-t-elle? Au moment où les crimes de Mimboman sont révélés au public, de nombreux cas de viols, d’inceste, de pédophilie, de violences alourdissent le quotidien des femmes. Battues certaines n’arrivent même pas à atteindre les portes des palais de justice, des permanences des associations féminines et féministes, ou des commissariats. Séquestrées parfois dans des mariages forcés, peu arrivent à dénoncer. Les seins repassés des unes ont du mal, à concurrencer les corps ébouillantés des autres. Fouettées, vilipendées, les femmes camerounaises sont le dos courbés sous le poids de la représentation que l’on a d’elles et qu’elles ont fini par avoir d’elles-mêmes !! Ne leur a-t-on pas fait croire depuis longtemps que « derrière chaque grand homme se cache une grande femme » ? Mais pourquoi alors doivent-elles rester derrière ? Elles avec un bel enthousiasme embrassent les folklores qu’on leur offre et défilent joyeusement au pas cadencé le 8 mars. Un jour de pagne qu’elles dressent comme un étendard provisoire pour éviter les coups, les regards. Mais pourront-elles oublier les filles de Mimboman ? Pourront-elles effacer les rites de veuvages auxquels certaines continuent de se soumettre ? Pourront-elles continuer à accepter les violences morales et le harcèlement dont elles sont régulièrement victimes?
En choisissant le thème «élimination et prévention des violences faites aux femmes et aux jeunes filles», on voulait mettre l’accent sur un phénomène : Le niveau de violences subies par les femmes qui a augmenté. Dans deux magnifiques romans « Trop de soleil tue l’amour » (1999) ; « Branle-bas en noir et blanc » (2000) , le regretté romancier Mongo Beti, faisait déjà allusion à ces trafics de jeunes femmes auxquels s’adonnaient les grands de ce pays en sacrifiant la puberté d’innocentes de 14 ans . Plus tard dans deux films, deux cinéastes de renom, décrivaient à quoi pouvaient servir les jeunes filles dans les cercles du pouvoir, c’est le cas de « Les Saignantes » (2005) de Jean-Pierre Bekolo et de « Mâh Saah Sah » de Daniel Kamwa (2008).


Dans ces œuvres, les trois auteurs rendent compte des dérives d’une société assoiffée de reconnaissance et de pouvoir, prête à jeter aux orties, dignité, intégrité et humanisme. Ils décrivent avec précision, les mécanismes de la méthode : la poursuite d’une réussite matérielle sans conditions, qui pousse tous ceux et toutes celles qui aspirent à cela à se livrer à toutes sortes de transactions. Mais ce qui est intéressant, ce sont les victimes qui sont sacrifiées : la majorité est constituée de jeunes filles et des femmes. Cependant aucun de ces auteurs ne fera la relation avec : les violences faites aux femmes et aux jeunes filles du fait du sexisme dominant la mentalité d’une société profondément phallocratique et machiste où au fond la femme est sacrifiée sous de nombreux prétextes... Comme si ces dérives-là, consubstantielles ne pouvaient pas être combattues.


Ce 8 mars 2013, au-delà d’être ce jour de pagne pour toutes les femmes doit être un jour de refus conte toutes ces tares. Ces violences qui font mal. Ces brutalités qui envoient ad patres de nombreuses femmes. Cette destruction de l’autre moitié du ciel, qui a fini par se laisser envelopper dans ces promesses faites aux hommes alors qu’elles ne figurent même dans leur agenda ! Plusieurs organisations de femmes avaient déjà analysé et décrypté la manière dont se manifeste au Cameroun, la violence sexiste : ce sont des violences sexuelles, de pratiques traditionnelles et de violences familiales. Ce 8 mars de pagnes et de femmes, cette 28ème journée des femmes doit apporter autre chose.
En ce jour de pagne pour tant de femmes, il faut arracher le voile et briser le mur des silences !!

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