Cameroun - Femmes. La veillée des battantes
Il est des distractions agréables uniquement dès la nuit tombante. Contrôler, au quartier Mvog Atangana Mballa, à Yaoundé, l’arrivée des véhicules chargés de vivres et de voyageuses, en provenance de l’arrière-pays, appartient à ces distractions-là.
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C’est mieux même de coller son nez sur ces morceaux de savon, pour ne pas voir passer des mirliflores s’admirant avec leurs oreilles ornées de boucles. Chance : voici, en train de s’immobiliser, deux camionnettes venant de Ngomedzap. Les femmes qui mettent pied à terre, tous les âges confondus, rejoignent leurs sœurs arrivées plus tôt. Quelques heures après, le groupe doit se défatiguer. Celles-ci, le foulard bien noué, dorment sur des pagnes élimés ; celles-là, insomniaques, parlant pour ne rien dire. A travers la conscience en paix et l’air joyeux se dégageant de ce décor, impossible de se croire face à des citoyennes en détresse. Par leurs bagages, comprenant essentiellement fruits, tubercules, condiments et poisson fumé, vous devinez aisément le statut de ces Eve : il s’agit de vendeuses et de revendeuses, approvisionnant les marchés de la capitale en divers aliments issus de nos villages, parfois hors d’atteinte, en saison pluvieuse.
Longez ensuite la route nouvellement bitumée de ce secteur, vers le pont d’Olézoa. Et arrêtez-vous, un instant, devant un bar dont l’enseigne rappelle le nom d’un grand magazine français, fondé en 1947 par Cino Del Duca. Quelle impressionnante faune féminine ! De la chute du jour à l’aube, tous les gabarits répondent à l’appel, dans des tenues aguichantes. Un seul lien de parenté les rassemble : bamboula et racolage. Et l’on peut se poser des questions. Pourquoi ces filles de joie n’imitent-elles pas l’esprit de commerce de leurs ainées et cadettes attendant, impatiemment, la matinée, autour de leurs marchandises ? Pourquoi ne décident-elles pas, après examen de conscience, de retrouver le terroir natal aux terres fertiles, au-dessus desquelles des tourterelles se répondent et invitent à se souvenir du conseil du Président Paul Biya, appelant à s’adonner aux activités agricoles, qui ne vous enferment jamais dans des mensonges ? Il convient en effet de copier l’exemple de ces battantes fières de vivre en zone rurale. Une zone rurale où elles se soucient de l’autonomisation et sacralisent leur corps qui, comme ne cesse de le souligner un aumônier catholique, sert de temple à Dieu.
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