Cameroun - Education. LETTRE OUVERTE À MONSIEUR JEAN ERNEST NGALLE BIBEHE MASSENA, MINISTRE DES ENSEIGNEMENTS SECONDAIRES

cameroun24.net avec Intégration Mercredi le 10 Mai 2017 Opinion Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Objet : de la violation du droit des conseillers d’orientation scolaire à la rémunération et de la considération de ces fonctionnaires au MINESEC

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Monsieur le Ministre, Depuis votre prise de fonction en octobre 2015 aux Enseignements Secondaires, la communauté éducative apprécie à sa juste valeur votre engagement et votre détermination à tordre le cou à la routine, à l’inertie et à la mauvaise gouvernance. Ce faisant, vous avez pris à bras le corps la gestion de plusieurs problèmes dont l’issue favorable est tout à votre honneur et à celui de votre équipe. Toutefois, un problème, et non des moindres, vient dessiner une ombre à ce parfait tableau : je veux parler de la violation du droit des conseillers d’orientation scolaire, universitaire et professionnelle (COSUP) à la rémunération et, s’il m’était permis autre chose, par la même occasion, attirer votre attention sur la considération sociale qu’une telle violation peut donner à penser quant à la pertinence de l’existence de ces experts au sein de votre ministère.

En effet, voici 17 ans déjà qu’à la faveur du décret 2000/359 du 5 octobre 2000 portant statut particulier des fonctionnaires des corps de l’Éducation Nationale, un corps des COSUP a été créé (art.2). Par rapport à la spécificité de leurs tâches, outre les primes de technicité, de recherche et de documentation payées à tous les fonctionnaires de l’Éducation Nationale, il avait été prévu une prime d’encadrement psychopédagogique et d’évaluation (art. 61 alinéa b).

Cependant, le décret 2002/040 du 4 février 2002 fixant les montants et les modalités de paiement des primes dues aux personnels de l’Éducation Nationale renvoie le payement de cette prime aux « disponibilités budgétaires » (art.7). Mieux, elle leur sera payée progressivement en fonction de la disponibilité budgétaire (art.7).

Monsieur le Ministre une telle incongruité juridique n’est-elle pas de taille pour interpeller quiconque ? Une incongruité qui autorise et protège une telle forfaiture devrait-elle laisser insensible ? Cette impudencene donne-t-elle pas de s’interroger sur le suivi des COSUP et des problèmes de l’orientation par les services compétents de votre ministère ?Est-ce à dire qu’entretemps l’encadrement psychopédagogique et l’évaluation ne devraient pas avoir lieu ? Puisqu’ils sont d’ores et déjà lieu à travers la passation et la correction des tests psychotechniques, les sessions d’information et formation en éducation à l’orientation et le conseil en orientation (cf. Arrêté N°40/10/MINESEC/SG/DPCPOS /CELOS du 5 mars 2010), un rappel de ladite prime est-il envisageable ? Si oui, à quelle hauteur ? Sinon, pourquoi faire faire aux COSUP l’encadrement psychopédagogique et renvoyer leur salaire à un paiement progressif en fonction des disponibilités budgétaires si tant est vrai que tout travail mérite salaire ?

Si c’est à son corps défendant que les conseillers d’orientation ont eu droit à leur prime de technicité pourtant régulièrement prévu (cf. Lettres N°713/06/MINESEC/ SG/DRH du 07 Août 2006 et N ° 4 4 3 / 0 7 / L / M I N E S E C / DRH/SDS/SSPEN du 14 septembre 2007 ou le communiqué rad i o N°45/07/MINESEC/SG/DPCPOS /CELOS du 02 Novembre 2007), cette autre violation est-elle l’officialisation d’une accusation d’indélicatesse et d’inconscience professionnelle ?

Monsieur le Ministre, vous conviendrez avec moi, et sans vous y contraindre, d’ailleurs que je n’ai pas qualité ni pouvoir, qu’il y a là une injustice qui affecte non seulement les COSUP, mais aussi ternit l’image du Cameroun en matière de démocratisation du droit à l’information et à l’orientation scolaires et professionnelles ; droit pourtant prévu et protégé par les dispositions des articles :
- 28 de la Convention des Nations Unies relatives aux droits des enfants ;
- 10 alinéa 3-a ; 15 alinéa 4-e et f et 28 alinéa c de la Charte Africaine de la Jeunesse ;
- 10 de la Convention sur l’Élimination de toutes formes de discrimination à l’égard des femmes.

Vous voudrez bien remarquer que le statut général de la fonction publique camerounaise protège le droit à la rémunération de tous les fonctionnaires et partant des COSUP (art. 24 et 27 du décret 94/1999 modifié et complété par le décret N° 2000/287). Dans le même temps, ce statut dit dans quelles conditions un fonctionnaire peut être privé d’une partie ou de la totalité de ses primes. Seuls l’absence de service, le refus de service, l’abstention de service et l’exécution en partie des obligations de service peuvent autoriser une retenue sur le salaire d’un fonctionnaire (art. 29 du décret N° 94/199 du 07 Octobre 1994 modifié et complété par décret N° 2000/287 du 12 Octobre 2000). Mieux, à « l’exception des cas de prélèvement obligatoire, notamment : les impôts et taxes assimilés ; la cotisation pour constitution des droits de pension, il ne peut être fait de retenues sur la rémunération du fonctionnaire concerné que par saisie-arrêt ou cession volontaire » (art. 28 du décret N° 94/199 du 07 Octobre 1994 modifié et complété par décret N° 2000/287 du 12 Octobre 2000).

Si tant est vrai que les primes constituent des éléments de salaire, d’où vient-il donc que des COSUP soient astreints à l’encadrement psychopédagogique et ne soient pas payés pour ce service rendu ? Les accuseraiton d’absentéisme, de refus de service, d’abstention de service et d’exécution en partie de leurs obligations de service ? Monsieur le Ministre, il y a là un conflit de loi que la Direction des Affaires Juridiques, la Direction des Ressources Humaines ou même la Direction de l’Orientation, de la Vie et l’Assistance Scolaire de votre ministère vous aurait fait savoir.

Car, en effet, en Droit, le général déroge sur le particulier. Allez donc savoir comment un décret particulier, celui de 2002/040 sur les montants et les modalités de paiement des primes dues aux personnels de l’Éducation Nationale, peut entrer en contradiction avec les dispositions du statut général de la fonction publique quant à ses dispositions sur le droit à la rémunération et aux conditions de suspension ou de payement en partie d’un salaire ?

J’ai conscience que vous n’êtes pas l’auteur de cet ignominieux décret 2002/040 et que je devrai m’adresser à son signataire, Monsieur le Président de la République, S.E. Paul Biya. Qu’importe ! Je voudrais croire que je ne fais pas fausse route en attirant votre attention parce que, vos missions vous rendent plus proches des COSUP contrairement au signataire qui attend de vous des suggestions techniques pour résoudre d’éventuels problèmes du terrain que ses nombreuses obligations ne lui permettent pas toujours de connaître.

Monsieur le Ministre, Dans tous les corps de métier, il y a des brebis galeuses. Le comportement de celles-ci ne saurait fonder une injustice aussi criarde à l’endroit de l’ensemble ; s’il était donné de supposer que ce fut le mobile du décret 2002/040 qui pénalise les COSUP.

Ayant déjà posé le problème que je partage ici autour de moi, il me revient ici et là que le COSUP « ne fait rien » et passe son temps professionnel à « combattre une incompréhensive oisiveté ». Son service serait un luxe et sa fonction une sinécure. Certains vont même jusqu’à penser que la violation du droit des COSUP à la rémunération n’est que « justice » parce qu’au moment où les enseignants travaillent, ces derniers se pavaneraient dans leur bureau, pour ceux qui en ont, ou se livreraient à leur «business » ou à des tâches sans rapport avec leur obligation professionnelle. Il y a la une infamie à l’endroit de nombreux COSUP qui, en dépit de nombreuses incompréhensions, se donnent à fond dans leur métier.

Au moment où on assiste à une marchandisation galopante du service éducatif (de 1998 à 2002, on comptait par exemple 18 Instituts d’Enseignement Supérieur Privé contre près de 230 en 2016); au moment où de nombreux jeunes abandonnent l’école sans préparation suffisante pour le marché du travail; au moment où d’autres poursuivent sans vision claire pour leur avenir professionnel diminuant de fait les chances de la rentabilité des dépenses éducatives consenties par des familles déjà appauvries, l’encadrement psychopédagogique constitue plus que jamais un rempart pour la construction des choix scolaires et professionnels réfléchis.

J’ai conscience que la pédagogie est« la priorité des actions à mener » aux MINESEC (cf. Circulaire N°11/16/C/MINESEC/SG/ CT2/ DAJ/CELSUI du 25 Aout 2016). Plus encore, que « l'enseignant est le principal garant de la qualité de l'éducation » (cf. Art. 37 alinéa 1 de la loi 98/004). Est-ce le lieu de dire que tout ce qui n’est pas pédagogie est résiduel au MINESEC ? À l’observation, tout porte à croire que oui ! Sinon, comment expliquer que cette violation du droit des COSUP à la rémunération n’ait pas trouvé solution 15 ans après le décret 2002/040 ? Est-ce à dire que depuis 15 ans il n’y a jamais eu de disponibilité financière ? Sans répondre à ces questions, l’observateur averti note curieusement que le projet de la colonisation de l’orientation par la pédagogie, lancé antérieurement à votre arrivée au ministère, a désormais atteint sa vitesse de croisière avec l’obligation de produire, pour les sessions de formation en salles de classes, des fiches pédagogiques, des fiches de progression, des taux de couverture, des taux de progression, des rapports des conseils d’enseignement, …. Obligations qui ne couvrent paradoxalement que les 1/5ème des 30h de service hebdomadaire d’un COSUP (cf. Art. 66 alinéa 3 du décret 2000/359) ! Pis encore, dans de leur formation initiale, aucune unité d’enseignement n’a trait à ces exigences. Monsieur le Ministre, le conseil en orientation et l’éducation à l’orientation sont des activités d’écoute, d’animation et d’accompagnement interactives et itératives destinées à fournir aux élèves et étudiants la possibilité de se motiver pour les études, de mieux se connaître et de découvrir les professions qu’ils pourront choisir un jour en connaissance de cause pour pouvoir s’épanouir et réaliser un travail socialement rentable.

L’ignorer conforte la violation ci-dessus décriée et convainc de ce que le MINESEC peinerait à savoir utiliser ses COSUP. D’où l’urgente nécessité d’interroger la considération qui est celle des COSUP si vos collaborateurs ne vous ont pas fait état de cette violation qui n’est qu’un exemple parmi tant d’autres.

Voilà ramassé ce que j’ai voulu partager. Vous avez là le fond du coeur d’un COSUP lésé, outré de se rendre compte que son droit à la rémunération est bafoué dans l’indifférence totale de son ministère employeur.

Loin de moi donc l’intention d’en rajouter à la pression opportune que vous subissez ces jours de la part de nos partenaires du « Collectif des Enseignants Indignés ». Par ailleurs, rendre publique ma préoccupation ne vous dénie nullement la primeur de la gestion des problèmes d’un personnel dont vous avez la charge. Tout au contraire, je voudrai être naïf de croire que parce que les COSUP font un service d’intérêt public, la communauté éducative se doit d’avoir connaissance de leurs préoccupations aux fins d’une solution conjuguée.

Monsieur le Ministre, j’ai conscience que cette sortie est une fronde pour ceux qui pensent que parce qu’on est employé on ne saurait se plaindre au risque de payer les frais. Je vous ai exprimé juste une colère débordante qui en appelle d’abord à la réflexion et ensuite à des mesures de remédiation urgentes. Je voudrai humblement compter sur votre sagesse pour comprendre que d’autres COSUP, toutes promotions confondues depuis 2000, date à laquelle ils ne sont plus intégrés comme des Professeurs des Lycées d’Enseignement Général, sont dans cette déplorable situation. Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de ma parfaite considération.

Joseph BOMDA, Ph D Conseiller d’orientation scolaire josephbomda@yahoo.fr

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