Lutte contre Boko Haram. Jean Pierre Kamga : « On ne naît pas kamikaze, on le devient »

Mutations Jeudi le 30 Juillet 2015 Opinion Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Le chef service psychiatrie de l’hôpital Jamot émet des réserves sur une définition type de ces personnes qui se transforment en bombes humaines.

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Qu’est ce qui peut pousser un être humain au suicide tel qu’on le voit dans  les attaques kamikazes observées dans l’Extrême-Nord du Cameroun ?

Je pense qu’il faut commencer par clarifier deux termes. Le terme suicide et le terme kamikaze. Le suicidaire en général c’est un individu qui est présumé présenter un trouble psychique qui affaibli suffisamment son tonus vital et qui voit son instinct de mort prendre de l’ascendance sur l’instinct de vie. Il va ainsi passer par plusieurs étapes, sous l’effet d’une maladie mentale, d’une contrainte psychologique à laquelle il a du mal à se soustraire. Une fois ces éléments réunis, vient l’étape du projet suicidaire. Et enfin le passage à l’acte. Si ce dernier est réussi, c’est un suicide, dans l’autre cas, c’est une tentative de suicide. La particularité étant que le sujet est tout seul, il n’engage pas les autres. Et portant le kamikaze se sacrifie tout en sacrifiant les autres.

Quel peut être son profil ?

Parlant du profil du kamikaze, il faut tout d’abord dire qu’on ne nait pas kamikaze. Jusqu’à présent il n’y a pas d’étude avec forte méthodologie qui tend à prouver qu’il y a des individus qui auraient un profil psychologique ou même génétiques qui les prédisposeraient à être kamikazes. Sinon, on devient kamikaze et le profil général veut que ce soit un individu jeune, adolescent ou jeune adulte. Ce qui correspond, en ce qui concerne l’adolescence, à une période plus ou moins difficile, du point de vue psychologique. C’est la période pendant laquelle le jeune cherche à s’affirmer, à marquer de son empreinte et à s’identifier à certaine figures de proue. C’est aussi la grande période de l’identification et du militantisme…

On remarque cependant qu’au Cameroun, les sujets indexés sont pratiquement encore dans l’enfance. Est-ce que cela ne bat pas en brèche toutes les théories scientifiques élaborées jusque-là ?

Evidemment, et ceci nous amène à nous poser un certains nombre de questions. Malheureusement toutes ces jeunes filles sont décédées, ce qui rend un peu difficile au stade actuel, les enquêtes. Pour pouvoir les cerner, qui sont-elles, de quelles familles sont-elles issues et quel a été leur parcours scolaire, éventuellement leur vie associative, religieuse, etc… C’est un ensemble d’informations qui nous auraient permis de comprendre la dynamique. Mais cependant, l’organisation dont elles sont issues (Boko Haram), est une organisation qui est en train de mettre sur pied une stratégie qui est nouvelle. Ils sont en train de s’adapter, d’innover, et les informations qui sont relayées par les médias, par exemple les stratégies pour pouvoir reconnaitre un kamikaze, pour l’appréhender, arrivent aussi à leur niveau et au fur et à mesure que les autorités se prononcent, ils s’adaptent et anticipent. Si on boucle les marchés, les gares voyageurs et autres, ils risquent frapper ailleurs. Au final la lutte contre ce phénomène est très difficile compte tenu de leur capacité d’adaptation. Il faut aussi remarquer que d’un point de vue psychologique, il est plus facile d’enrôler une femme, jeune comme adulte que de la faire avec une personne de sexe opposé. Ceux qui les formatent et les fabriquent se basent sur leur faiblesse psychologique, sur leur ignorance, et pour ce qui est des jeunes, sur le fait qu’elles n’ont pas d’ancrage familial et social solides. C’est le conditionnement ou encore lavage de cerveau.

Quelle similitude  faites vous justement entre les actes posés après le lavage de cerveau et ceux sous hypnose par exemple ?

L’hypnose est une méthode psychothérapeutique qui est très utilisée en psychologie et en psychiatrie dans l’optique de pouvoir guérir certaines maladies. Mais l’objet de l’hypnose peut être détourné à d’autres fins.

Tels que ces attentats ?

C’est possible. En général ces kamikazes qui sont bourrés d’explosifs et qui se font exploser dans des lieux publics ne sont dans un état normal, mais plutôt dans un état de conscience modifié. Leur libre-arbitre est comme vicié. Ils sont dans une sorte d’illusion où il n’y a plus de frontière entre la réalité et le virtuel. Tout ceci est la résultante du lavage de cerveau, du conditionnement et même de l’absorption des substances tels le cannabis et autres drogues. Mais tout ceci reste de l’ordre des hypothèses. La résultante restant cependant l’abolition de leur capacité de penser et de raisonner, afin que le kamikaze ne soit qu’un simple exécutant.

Est-ce qu’il est possible d’y remédier ?

Les kamikazes en général font partie des groupes assez fermés qu’on pourrait qualifier de sectaires et c’est dans le cadre de ces groupes qu’ils vont recevoir leur idéologie qui sous-tend leur formation, leur lavage de cerveau et leur conditionnement. Dans le même registre, on classe les sectes fondamentalistes qui émettent un message subliminal. C’est un phénomène très complexe. Je pense pour cela que les leaders religieux ont la responsabilité de la sensibilisation des consciences contre les messages offensifs. Parce que, que ce soit le Dieu de Mahomet ou celui de Jacob, toux ces Dieux sont des Dieux de paix.

Propos recueillis par G.P.O

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