Le Tribunal criminel spécial s'est saisi de l'affaire et promet des éclaboussures à plusieurs niveaux.

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C'est le genre d'histoires rocambolesques, qu'on croyait oubliées avec l'entrée en service du Tribunal criminel spécial (Tcs) et la vague d'arrestations de gestionnaires de deniers publics. Cette haute instance a pourtant ouvert les auditions, et la série d'arrestations ne devrait pas tarder.

En décembre 2010, une mission de la direction générale du Trésor (Dgt) du Ministère des Finances (Minfi) se rend à Douala dans le cadre des opérations d'exercice et de clôture de la balance des comptes. Des responsables de ce département ministériel viennent d'avoir vent de manœuvres dolosives, touchant les finances publiques dans ce bureau phare. Il est question, selon des rapports concordants, d'«écarts» importants dans les comptes établis par la Trésorerie générale du Littoral et l'agence centrale du Trésor de Yaoundé. Le trésorier payeur général (Tpg) d'alors, M. Ndzana, est sur la sellette et vient d'être affecté à Bafoussam. Curieusement, lors de la passation de service, le 10 janvier 2011, le Tpg sortant prétexte des problèmes de gestion interne, marqués notamment par des difficultés de saisie informatique, pour ne pas dévoiler les résultats comptables au 31 décembre d'avant. Les résultats considérés seront donc ceux enregistrés b octobre 2010, avec un solde officiel de 2.251.067.181 francs.

L'installation du nouveau Tpg se passe sans anicroches. La période transitoire ne durera pourtant que le temps d'une rose, car quelques jours plus loin, un contrôle de caisse de routine dévoile un trou abyssal. Le caissier principal, Thomas Tcheuko Ngallè, est interpellé par la police. Il passe à table, mais ne reconnaît qu'un déficit de 700 millions de francs, une somme qu'il avoue avoir utilisée pour ses affaires personnelles.

Une autre mission de la Dgt, dépêchée à Douala en début février 2011, découvre le pot aux roses: le trou dans les caisses est de 2.025.399.312 francs au 16 février de cette année-là. Qui a pris les milliards? Toujours est-il que les choses s'emballent. L'inspection nationale des services du Trésor entre rapidement en scène. Elle compulse à nouveau les éléments comptables, dès le 20 suivant. Le nouveau Tpg, M. Mbock, refuse toutefois d'apposer sa signature au bas du procès-verbal arrêté à cet effet. Il gardera le document par devers lui. Le lendemain, au moment de le restituer, les inspecteurs constatent, ahuris, que la page 2 du PV a été nuitamment subtilisée au profit d'un autre document comptable, qui au 31 décembre 2011 pointe un déficit de 1.189.473.611 francs. Des copies du PV falsifié, qui est daté du 16 février 2011, sont ventilées aux hautes autorités. Le gouverneur du Littoral alerte aussitôt les renseignements et la présidence de la République.

La suite est un gros embrouillamini. Au cours d'une réunion sous haute tension, tenue début mai 2011 à Douala, les participants, dans leur grande majorité, conviennent qu'il est impossible, comme veut le faire croire le Tpg, de rattacher un déficit mis au grand jour en février 2011 l'exercice 2010.

C'est dans la foulée que de hauts cadres du Minfi sont renvoyés à Douala, avec pour mission l'établissement du solde de caisse au moment de la passation de service entre les deux Tpg. Celui-ci s'élève finalement à 2.257.295.884 francs. MM. Ndzana et Mbock apposent leur signature au bas du procès-verbal accablant. Plus tard et «sans équivoque», un rapport de mission établira, «la responsabilité du caissier principal dans le détournement consécutif à des prélèvements opérés [...] sur l'encaisse à la Trésorerie générale de Douala». Thomas Tcheuko Ngallè, mais aussi d'autres gestionnaires de crédits, — présents ou passés — du Littoral, vont devoir expliquer leur alchimie comptable la barre du Tcs. Chaud devant! 

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