Cameroun - Politique. Cameroun - Lente agonie du renouveau: Les langues se délient déjà

PONUS | Ouest Littoral Jeudi le 13 Mars 2014 Opinion Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Il y a quelques jours, deux éminentes personnalités du paysage socio-politique camerounais ont évité, par médias interposés, le style de la langue de bois et des motions de soutien pour dire leurs vérités sur la marche de notre République par ces temps où on vit une fin de règne qui s'entête. Révélations!

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Le professeur Hubert Mono Ndjana est un enseignant d'université bien connu du grand public aussi bien à travers ses publications, que son engagement en politique, notamment au sein Rassemblement démocratique du peuple Camerounais (Rdpc), parti au pouvoir où il fut l'un des tout premiers secrétaires à la communication.

«Si le Cameroun doit continuer à rester en paix, un frère de Biya, c'est-à-dire un béti quel qu'il soit, ne doit pas songer à lui succéder, sinon le Cameroun risquera de basculer dans la guerre civile.

Dans un entretien accordé à Cin, le Pr Mono Ndjana a fait le tour de son parcours et explique les raisons de sa déchéance de l'exécutif du Rdpc. Il a aussi saisi cette occasion pour aborder des questions sensibles concernant l'actualité. Entre autres, l'opération épervier, la mort de Charles Ateba Eyene, le Rdpc, les décrets présidentiels portant commutation et remise des peines, etc., et surtout les questions brûlantes de l'heure, telle que la succession de Paul Biya au sommet de l'Etat.

Sur ce dernier point, répondant à une question relative à ses impressions sur la conférence de presse du professeur Titus Edzoa, après sa libération, cet universitaire a saisi la brèche pour donner sa position sur cet épineux problème qui, pour certains, parait tabou: «Ce que je n'approuve pas chez Titus Edzoa; c'est qu'il continue à dire qu'il veut être le successeur de Biya. Je voudrais profiter de cette tribune pour mettre les Camerounais en garde. Si le Cameroun doit continuer à rester en paix, un frère de Biya, c'est-à-dire un béti quel qu'il soit, ne doit pas songer à lui succéder, sinon le Cameroun risquera de basculer dans la guerre civile. Je précise que si les frères de Biya ont de l'argent, qu'ils l'investissent dans des industries porteuses, dans des secteurs rentables. Mais qu'ils abandonnent l'idée suicidaire de remplacer Paul Biya à la tête de l'Etat du Cameroun. On a beau dire que je ne fais pas du tribalisme, mais la réalité est que nous sommes dans un pays tribal. Si vous ne tenez pas compte de cette donnée et que vous choisissez de faire une politique nuageuse et éthérée basée sur la démocratie sans tribus, au point de vouloir remplacer le Président Biya par un autre Béti, là vous vous trompez, sur toute la ligne! Après trente longues années de règne, il est évident que les autres tri¬bus n'accepteront jamais qu'un autre frère du Président arrive au pouvoir après lui».

Un professeur déchaîné

Pour répondre à certaines rumeurs qui faisaient état de ce que certains militaires projetaient d'assassiner des personnalités de premier plan lors de cette succession, le professeur poursuit: «En géopolitique, il faut tenir compte de tous les paramètres.., mais je voudrais dire aux Camerounais qu'ils doivent éviter un format de succession qui puisse être explosif.., si ces militaires projettent des assassinats, ça veut dire que le Cameroun va basculer dans une guerre civile et un chaos indescriptibles. Eu égard au degré de richesse et de puissance d'un certain nombre de nos compatriotes, je ne doute pas un seul instant que quelques-uns, iront même jusqu'à louer des mercenaires, voire des armées d'autres pays du continent, pour qu'ils viennent combattre au Cameroun... je ne souhaite pas qu'on n'en arrive là. C'est la raison pour laquelle j'ai solennellement interpellé mes frères, afin qu'ils puissent conjurer l'idée de polluer l'atmosphère, en se déclarant candidats à la succession de Paul Biya!»

Une analyse froide qui ne surprend nullement ceux qui se souviennent encore que cet homme à qui le Rdpc n'a rien apporté malgré ses loyaux services rendus à ce parti, avait solennellement demandé à l'actuel Chef de l'Etat de ne pas se représenter en octobre 2011. Ce que ne lui ont jamais pardonné les hiérarques du parti, y compris Paul Biya. C'est d'ailleurs, selon certaines informations, ce qui aurait motivé le rejet de sa candidature aux dernières sénatoriales... Mais pour la victime, elle considère ce n'était que la manifestation de la liberté et de la démocratie: «En demandant solennellement au candidat naturel de ne pas se représenter, j'usais là de mon droit de liberté...».

Un homme dépité

«Parce que j'ai essayé de dénoncer un réseau de faux doctorats on m'a chassé comme un malpropre, on m'a chassé afin que ça ne s'ébruite pas».

A la question de savoir si Mono Ndjana n'est pas à l'origine de vos propres déconvenues, pour n'avoir par exemple pas voulu intégrer les loges, malgré les multiples sollicitations, celui-ci répond: «On avait demandé à m'initier, mais j'avais décliné l'offre. Le négociateur m'avait d'ailleurs promis monts et merveilles, je lui ai dit d'aller chercher ailleurs si c'était la condition pour être récompensé». Autant de choses qui ont fait de lui un mal-aimé, presque voué aux gémonies de la République: «Mal-aimé! Le mot est bien choisi... je ne suis pas aimé. A voir la manière dont j'ai quitté l'Université de Yaoundé 1, que j'ai pourtant servie pendant 30 ans avec honneur et fidélité, alors que je n'avais jamais violé une fille, que je n'avais jamais détourné de l'argent, alors que je n'ai jamais vendu une UV, ni même une licence, votre mot «mal-aimé» trouve là tout son sens. Parce que j'ai essayé de dénoncer un réseau de faux doctorats, on m'a chassé comme un malpropre, on m'a chassé afin que ça ne s'ébruite pas. Mais ça s'est ébruité parce que mon honnêteté intellectuelle m'empêche de cacher qu'il y'a un réseau de faux doctorats. L'un dont je suis au moins sûr à 100% est celui attribué à une dame. Je l'ai dénoncé au niveau du doyen, au niveau du recteur j'irai même jusqu'à le dénoncer au niveau de l'Unesco puisque rien n'a été fait. Ça montre clairement que le pays est pris en main par une clique de gens qui commettent le mal exprès».

L'avocate assassine le régime

«Sous Ahidjo, je n'ai jamais eu de problèmes comme j'en ai aujourd'hui...»

Dans l'émission de la chaîne Vox Africa qui s'intitule "Elles se racontent" du 6 mars dernier, c'est Me Alice Kom, première femme avocat au Cameroun qui s'est lancée dans une comparaison entre Ahidjo et Biya. S'agissant des libertés individuelles sous les deux régimes, elle affirme: «sous Ahidjo, je n'ai jamais eu de problèmes comme j'en ai aujourd'hui... Ahidjo laissait chacun faire son travail même quand j'ai défendu des subversifs comme Kamdem Ninyim, Albert Dongmo...». Aujourd'hui, avec le régime Biya, Me. Alice ne cache pas sa déception: «je n'ai jamais imaginé qu'il était comme je le vois aujourd'hui. Quand vous êtes Chef d'Etat, vous devez vous soucier de vos populations». Elle déclare avoir cru à Paul Biya quand il lançait l'Opération Epervier. Mais hélas! "L'Opération Epervier a tout de politique, rien de juridique".

Les interventions de ces deux personnalités donnent enfin l'image d'une intelligentsia qui prend position avec des convictions intellectuelles, loin des flagorneries et des motions de soutien à l'homme, sans qui, ils ne seraient rien. Vivement que cela fasse tache d'huile. 

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