Lutte contre Boko Haram. Cameroun - Ambiance dans le sérail: Paul Biya dans l’étau de «ses créatures»

Joseph OLINGA N. | Le Messager Mercredi le 10 Septembre 2014 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Entre tenants du discours sur une rébellion interne et chantres officiels d’attaques orchestrées par la secte islamiste Boko Haram d’origine nigériane, la ligne de démarcation est bien mince.

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Entre tenants du discours sur une rébellion interne et chantres officiels d’attaques orchestrées par la secte islamiste Boko Haram d’origine nigériane, la ligne de démarcation est bien mince. A l’exception du discours propagandiste, la question relative à la nature des forces en présence dans l’Extrême-Nord reste entière. Idem de l’identité des interlocuteurs et présumés Boko Haram visiblement connus de certains hommes politiques camerounais.

Pour qui parlent-ils ? Ministres, députés et autres cadres politiques proches du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc) ou en poste dans le gouvernement, depuis le début des actes de grand banditisme qui se déroulent dans l’Extrême-Nord du Cameroun, donnent à voir de l’incurie, des dissonances et des inimitiés qui font leur lit au sein des structures gouvernantes du pays. Comme pour recadrer le débat et donner les assurances du gouvernement, le ministre de la Communication, lors d’un point de presse donné à Yaoundé le 5 septembre 2014 entend affirmer que les attaques et autres actes criminels que connaît l’Extrême-Nord du Cameroun «sont le fait des assaillants venus de l’extérieur». Question de mettre un bémol aux affrontements ouverts sur fond d’accusations et d’invectives auxquelles se livrent certains apparatchiks du pouvoir.

Il ne faut pourtant pas se limiter à cette évocation pour voir dans la sortie du ministre Issa Tchiroma Bakary les relents d’une incohérence communicationnelle et la prolongation de la thèse du complot interne. Quoique dénoncé en premier lieu par le ministre de la Communication, le propos d’Issa Tchiroma ne dément aucunement. A priori, Issa Tchiroma semble condamner «certaines voix animées d’intentions malveillantes.» Qui selon ses propres propos choisissent de faire croire que les exactions «du Boko Haram» contre le Cameroun sont en réalité la manifestation d’une rébellion interne à notre pays. Il ne faut pourtant pas perdre de vue qu’au cours de la même communication, Issa Tchiroma soutient que : «Il est possible que Boko Haram ait pu recruter, dans les villages frontaliers, quelques compatriotes en situation de précarité socioéconomique.»


Allégations et distractions

Allégations infondées et irresponsables ou distraction? Le ministre de la Communication a beau jeu d’indexer des médias qui auraient pour objectif de porter atteinte à la cohésion et à l’unité nationale. A ce propos, «une sévère mise en garde» est par ailleurs adressée à ces médias. Des médias dont le péché semble d’avoir porté à la connaissance de l’opinion nationale et internationale les faits tels que vécus sur le théâtre des opérations et au sein des structures dirigeantes du pays.

Au constat, dans ce mélodrame qui se joue à ciel ouvert et qui oppose non pas les populations et «les esprits fragiles» mais plutôt les apparatchiks du pouvoir, aucune question ne trouve réponse. Peut-on parler «d’allégations infondées» lorsque la troisième personnalité de la République dénonce officiellement l’existence de relais terroristes au sein du pays? Présenté comme une guerre asymétrique, comment comprendre les relations de certains responsables gouvernementaux et politiques avec ce qui apparait plus, pour nombre d’observateurs, sous le prisme de bandes armées, loin du mode opératoire originel de Boko Haram? D’autant plus que, les experts situent l’activisme de ce groupe à l’idéologie confessionnelle et politique dans le Nord du Nigeria. Une région à partir de laquelle la bande à Abubakar Shekau entend réaliser le double objectif d’y établir un Etat islamique et opposer un contrepoids au pouvoir central d’Abuja.

Certes, le ministre de la Communication, Issa Tchiroma, visiblement dans la posture de «Porte-parole» du gouvernement dissocie les interpellations de certains proches de l’ancien ministre de l’administration territoriale et de la décentralisation, Marafa Hamidou Yaya d’avec les évènements de l’Extrême-Nord. Mais la thèse d’implications internes reste constante dans le discours du Mincom. Issa Tchiroma Bakary soutient à ce sujet que «Cette affaire, en l’Etat actuel de nos informations, n’a aucun lien avec la lutte contre Boko Haram.» Le ministre de la communication indique néanmoins que «Monsieur Abdoulaye Siddiki et Me Harissou ont été interpellés par les services de sécurité dans le cadre d’une enquête en cours portant sur des menaces à la sûreté de l’Etat.» Présomptions liées à de probables contacts avec des groupes armées centrafricains. Donc certains, dixit Issa Tchiroma « sont responsables d’attaques contre le Cameroun».

Joseph OLINGA N.



Le feu qui vient du Rdpc

Face à la presse, le ministre de la Communication insiste : «les allégations proférées au sujet d’une rébellion dans les régions septentrionales, sont clairement de vulgaires manœuvres de division et diversion dont personne n’est dupe.» Une assertion en contradiction avec celles de certains de ses collègues du gouvernement et d’autres personnalités en vue de la République. Président de l’Assemblée nationale et élu du département du Mayo Sava, CavayeYegué Djibril clamait, lors de l’ouverture de la session parlementaire de juin, que les complices de Boko Haram doivent être recherchés. Tout comme la même source soutient que «Nous le savons, beaucoup (Les Boko Haram, Ndlr) sont parmi nous, les un tapis dans l’ombre, les autres très actifs dans l’hypocrisie faisant semblant d’apporter leur aide aux autorités, leur objectif étant de brouiller les pistes, certainement pour mettre le pays à feu et à sang.» Des affirmations à l’initiative de la déclaration de certaines élites du département de la Lekié?
Sous l’impulsion du chef de la délégation du Comité central du Rdpc dans la Lekié, l’on apprend alors que la guerre est ouverte contre les complices de Boko Haram. «Principalement dans les régions septentrionales du Cameroun.» Des complices, affirment la correspondance à polémique, développeraient des stratégies sournoises visant à la partition du territoire national. Des allusions que réfute le président de l’Assemblée nationale. Reste que, dans ce déferlement épistolaire et verbal, ni l’identité, ni la localisation de ces groupes et autres personnes que l’essentiel des membres du gouvernement et certains acteurs politiques de renom évoquent avec tant d’aisance n’est cité avec une exactitude certaine.

Pour le compte du Comité central du Rdpc, Jacques Fame Ndongo, secrétaire à la communication, au nom du secrétaire général, sur hautes instructions du président national du «parti du flambeau ardent» demande «à toutes les militantes et à tous les militants du Rdpc de continuer de se mobiliser (…) pour barrer la voie aux adeptes de la violence, en faisant preuve, toutefois, de discernement.» De quoi calmer les esprits au sein même du Rdpc et du gouvernement? Au regard des suspicions et autres dénonciations observées au sein du sérail n’y a-t-il pas lieu de questionner certaines évocations émanant des cercles mêmes du pouvoir? Dans ce climat empreint de haine, de dissonance communicationnelle, positionnement politique et exacerbation du tribalisme, Paul Biya garde t-il toujours toutes les cartes en main ?

Joseph OLINGA N.

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