Cameroun - France. Bassek ba Kobhio : « La France doit déclassifier les documents sur l’histoire du Cameroun »

Mutations Vendredi le 03 Juillet 2015 Culture Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Accords de défense, sentiment anti-français, guerre contre Boko Haram, longévité au pouvoir de Paul Biya…le philosophe et homme de culture (auteur d’un documentaire sur le maquis), analyse le contexte de la visite au Cameroun de François Hollande ce jour.

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Que représente pour vous la visite de François Hollande au Cameroun, 14 ans après la celle du président Jacques Chirac ?

Cette visite peut être différemment appréciée. Effectivement cela fait 14 ans qu’un chef d’Etat français n’est pas venu au Cameroun. A certains, cela faisait plaisir parce que c’était comme une espèce de défiance, ou tout au moins de distance avec le pouvoir  camerounais. A d’autres,  cela posait un problème, parce que précisément ils estimaient qu’il n’y avait pas de raison fondamentale qu’il y ait une distance entre le gouvernement français et le gouvernement camerounais,  d’autant que l’on sait très bien sur le plan historique le régime qui gouverne le Cameroun depuis 1957 et ce jusqu’à nos jours  a été porté sur ses fonds baptismaux par la France. Mais pour le nationaliste que je suis et qui veut que son pays compte, quel que soit le contexte, je me dis qu’il vaut mieux  venir 14 ans après plutôt que jamais. Le Cameroun est quand même en Afrique un pays qui pense qu’on pourrait recueillir son avis sur la marche du monde, ou tout au moins du continent.   Reste que la durée de la visite pose un autre problème : le visiteur qui se déplace pour vous rendre visite en Afrique se donne souvent la peine de dormir chez vous. L’Afrique, il ne faut jamais l’oublier, est une terre de symboles. Mais bon, cette visite va avoir lieu. Nous espérons que les questions sérieuses seront abordées à cette occasion pour que s’estompent de part et d’autre les raisons de développer un antagonisme, et qui sont relativement nombreuses.  Parce qu’il est évident pour tout le monde  que ces temps-ci, à la fois pour le grand public et pour l’élite politique, il y a une bonne distance prise vis-à-vis de la France.  Et c’est nouveau : le peuple profond s’est toujours tenu, du fait de son nationalisme ombrageux, à une certaine distance de la France officielle. Aujourd’hui l’élite gouvernante s’en mêle, certes pas pour les mêmes raisons, mais le résultat est le même.

François Hollande arrive dans un pays où la France a perdu d’importantes parts de marchés même si ce pays reste le premier partenaire commercial du Cameroun ; et où le sentiment anti-français prend de l’ampleur. Est-ce un risque ou un atout ?

Lorsque vous parlez de perte de parts de marché c’est une vision de Camerounais colonisé qui s’exprime, et je peux bien vous comprendre. Dans la mesure où les documents historiques très bien répertoriés nous  montrent   effectivement que lorsqu’on la France choisit ceux à qui elle va confier la gestion du Cameroun, elle prend le soin de protéger et de privilégier ses intérêts.  Alucam a un prix d’accès à l’électricité extrêmement favorable, le chemin de fer était conçu pour exporter et importer les produits utiles à la mère patrie, etc. Les  gens se sont mis en tête, de part et d’autre, que tout était acquis à la France. Sur le plan purement politique, et sur le plan des textes et des accords, il y avait une part réservée à la France.  Mais un acquis ne l’est que tant qu’il dure. Il y a de nouveaux partenaires surgis il y a moins d’une décennie quasiment, qui ont la technicité et le nombre, qui ont aussi de manières de fonctionner absolument pas recommandables là où l’on est de plus en plus regardant en occident, et le terrain devient ouvert pour toutes les équipes. Les Chinois qui sont loin de s’embarrasser de morale sont dans la cour, contraignant la France à faire des efforts à la fois au niveau de l’offre, au niveau du travail à faire et au niveau de la concurrence. Pourrait-on reprocher à un pays de chercher à se développer à un moindre coût, à la seule condition que cela soit véritablement à un coût moindre pour un même résultat de qualité ?

Qu’en est-il du sentiment anti-français ?

Le sentiment anti-français, puisque vous tenez à l’appeler ainsi, n’est pas nouveau au Cameroun. Le sentiment national camerounais, forcément anti-français puisque nous étions en guerre, remonte aux années 1955, au moment où la France décide d’exclure l’Union des populations du Cameroun (UPC) du jeu politique national. Simplement, je le disais,  le sentiment national camerounais de la population qui s’adressait autant à la France qu’à l’élite politique régnante se double depuis peu d’une grogne de cette élite, depuis l’avènement du phénomène  Boko Haram. Ce que vous appelez le sentiment anti-français a gagné les salons huppés de Yaoundé. Il n’en demeure pas moins qu’il faudra toujours distinguer le patriotisme du Cameroun profond qui n’a pas encore   pardonné à la France le fait qu’elle ait décidé de faire gérer notre indépendance par des gens qui n’en voulaient pas et n’y étaient pas suffisamment préparés. C’est peut-être cette conjonction entre le nationalisme lointain et historique et  le sentiment dit anti-français récent, qui fait qu’on en parle plus. Mais autant le nationalisme camerounais est plus profondément ancré dans le cœur des camerounais et dans l’histoire,  autant la bouderie des élites pourrait être jugulée du jour au lendemain.

Quel rôle le philosophe et homme de culture que vous êtes peut-il jouer pour combattre le complexe d’infériorité des peuples Africains, à travers leurs chefs, vis-à-vis des présidents Français ?  

Je crois que cette faiblesse intellectuelle commence à s’estomper.  Depuis la deuxième guerre mondiale lorsque nous avons vu des Blancs tomber sur le champ de bataille, et que la France a été occupée par les forces nazies, etc.,  la fin du mythe de l’invincibilité du Blanc a commencé à faire son chemin.  Et puis il y a aussi le travail intellectuel dont vous parlez. Pendant longtemps, tout ce qui était culturel nous était « imposé » par la France. Depuis, d’autres possibilités sont apparues, à la fois au niveau de la production que de la diffusion intellectuelle, et ça change tout.   Ca fait que nous devenons de moins en moins dépendants, nous sommes de moins en moins branchés  sur les ondes de la France. Les enfants qui naissent aujourd’hui,  ne sont plus conçus dans le même moule que nous. Ils sont beaucoup plus indépendants. Trois ou quatre siècles de colonisation, il ne faut pas sous-estimer ce que cela a représenté. Nous avons tout perdu pendant cette période. L’église a achevé de nous inféoder et le phénomène des églises réveillées qui  perpétue la colonisation nous tient encore enchaînés, mais nos fils n’ont plus aucun complexe face au blanc, et cela change tout.   Ce processus de décolonisation mentale prend du temps mais il est depuis longtemps déjà en marche. Autant il est facile de coloniser les gens, autant la décolonisation prend du temps.   Pour achever le recouvrement de notre identité et de notre libre arbitre, il va falloir  maîtriser totalement nos moyens de fabrication et de circulation de la pensée, et recouvrer toute notre histoire, là est le carrefour, le lieu de notre réconciliation possible avec la France.

Parlant de la thèse du complot français par rapport à la guerre contre Boko Haram. Est-ce qu’elle vous semble exagérée ou alors on est encore dans des proportions diplomatiques ?

Pour le peu d’informations que je peux avoir j’estime que parler d’un complot de la France par rapport à la guerre contre Boko Haram, cela me semble gros. Parce que pour que vous soyez partie-prenante d’un complot,  il faudrait que vous ayez des intérêts  évidents, que vous sachiez ce que vous allez gagner au bout.  Les pays francophones africains à la tête desquelles la France a placé qui elle voulait à l’indépendance, sont aujourd’hui comme des épouses d’un même mari. Et la France qui a toutes ses épouses-là sait très bien que lorsque ça va très mal dans la cour d’une épouse, on attend qu’elle intervienne comme elle l’a fait au Mali.   Les camerounais attendaient de la France  qu’elle vienne « payer sa dette » camerounaise comme au Mali, d’autant que c’est à Paris que Paul Biya a déclaré la guerre à Boko Haram. Ça m’étonnerait que la France soit mêlée de la manière dont on le dit au développement de Boko Haram  bien qu’il soit légitime après  le Président Tchadien Idriss Deby de se  poser la question  de savoir d’où viennent les armes, y compris françaises, qu’on retrouve entre les mains des terroristes.  Il y a une littérature qui se développe et qui fleurit par rapport à cette éventuelle connivence. Mais c’est un fait qui est très difficile à établir, ce d’autant que les vendeurs d’armes se retrouvent partout aujourd’hui.

On conviendra tout de même que c’est la France qui allumé le feu en Lybie et que la crise dans ce pays a généré la libre circulation des armes, de la drogue, etc. ?

La Lybie, c’est des lubies de puissance de Nicolas Sarkozy qui voulait régler on ne sait quel problème, comme si Kadhafi était le plus grand dictateur du monde. Mais peut-être avait-il intérêt à ce que Mouammar Kadhafi disparaisse. Si la France est aujourd’hui en première ligne de toute cette animosité islamiste, c’est aussi à cause de son intervention en Lybie où il y a eu un bordel terrible qui va être difficile à redresser.

Et l’intervention au Mali ?

L’intervention française au Mali est à saluer pour la simple raison qu’il est des situations où il n’y a pas à hésiter. Les camerounais s’attendaient à ce qu’il y ait la même promptitude dans l’intervention au niveau du Cameroun.  Quand vous êtes comme la France avec des épouses partout sur le continent, chacune des épouses attend que lorsqu’il y a des problèmes vous interveniez. Ce n’est pas le nationaliste qui parle, mais je me mets dans la logique de ceux qui acceptèrent de sceller le pacte néocolonial avec « la métropole ». Ils auraient certainement voulu voir ces camions qui quittaient il y a quelques mois le port de Douala aller à l’Extrême-Nord, alors qu’ils allaient en réalité en Centrafrique.  Mais je ne crois pas que les choses étaient aussi faciles, parce que cela aurait voulu dire que la France pouvait également intervenir au Nigeria. Et puis il ne faut pas se le cacher, sur le plan international le gouvernement français aujourd’hui est obligé de tenir compte d’une perception des choses par une certaine gauche en France. Et je ne suis pas sûr qu’une intervention importante de la France au Cameroun apparaitrait, comme ça été le cas au Mali, comme quelque chose de positif et de favorable aux yeux de tout le monde en France.   Je suis même certain qu’il y a quelque part en France   des gens qui, de manière idéologique, ne seraient pas heureux que des pays comme le Cameroun bénéficient du soutien de la France.

Parlant toujours de ce sentiment anti-français au Cameroun. Est-ce qu’on ne peut pas y voir une forme de guerre préventive par rapport à ce qui s’est passé en Côte-d’Ivoire ?

Je n’en suis pas sûr. Et si c’était le cas il y aurait une forme de contradiction dans la démarche. Je crois que les Camerounais reprochent à la France de n’être pas intervenue de manière forte là où en Côte-d’Ivoire on reprochait à la France d’être intervenue.   On ne peut pas dire une chose et son contraire.  

Est-ce  que la France a les moyens et la volonté de s’acquitter de sa dette vis-à-vis du Cameroun compte tenu des massacres qu’il y a eu durant la période coloniale ?

Il y a eu une vraie guerre d’indépendance jusqu’en 1971, et beaucoup de Français ne le savent pas ou refusent de le croire.   Et je ne pense pas qu’on solde un antagonisme historique de cette dimension-là par des biens ou des rachats. On permet à des jeunesses de connaître la vérité et de se rapprocher autour de cette vérité.    

La France peut-elle réellement, à partir de la seule intervention en faveur du Cameroun contre Boko Haram, se racheter de tous ces crimes de guerre ?

Le problème franco-camerounais est d’abord un problème historique et psychologique. Il faudrait dans un premier temps que la France reconnaisse la réalité et la vérité de cette guerre que nous avons menée et qu’elle lève tous les interdits sur toutes les archives françaises relatives au Cameroun pour que l’histoire soit connue. Parce que tant qu’on ne connait pas cette histoire, on ne pourra jamais savoir quelle est l’étendue de la dette morale qu’il faudrait payer, même symboliquement.   Les camerounais ignorent jusqu’à ce jour les circonstances exactes de la  mort de Um Nyobe. Je parle de ce leader nationaliste mais le problème concerne l’ensemble du Cameroun nationaliste en général. Nous devons chercher à comprendre sur quoi repose la société camerounaise, comment jurer tous ces conflits qui traversent la société camerounaise et qui   survivent aux décennies. Cela nous ferait énormément de bien par rapport à notre unité nationale de savoir ce qui s’est réellement passé.

Est-ce le règlement de la dette par la France, ne passe-t-il pas par la facilitation dans  l’obtention des visas aux ressortissants Camerounais ?

Je suis tout à fait d’accord avec pour que des facilités soient effectivement accordées à ces jeunes Camerounais qui veulent aller en France de façon régulière pour faire par exemple des études. Mais en même temps l’on peut comprendre la difficulté des différents gouvernements Français à le faire notamment à cause de la montée de l’extrême droite.  Même sur ce point précis vous constaterez d’ailleurs que ces dernières années les jeunes camerounais ne rêvent plus de la France. Ils vont de plus en plus aux Etats-Unis, en Allemagne ou encore en Chine.  

Il y a également cette nébuleuse dans les rapports franco-camerounais qui concernent les accords de défense. Est-ce qu’il ne faudrait pas également clarifier tout cela afin que certaines suspicions soient aplanies ?

Je crois que dans cette affaire d’accords de défense, de part et d’autre, on tient à ce que la confidentialité demeure. Quand je vois la France trainer dans son intervention sur le conflit contre Boko Haram, je me demande simplement s’il n’y a pas eu des modifications concernant certains aspects de ces accords de défense.  Tout comme je ne suis pas sûr que des accords de défense où que ce soit, puissent être rendus publics. Il faudrait peut-être simplement qu’il y ait des clauses claires, des clauses fortes. L’accent à mon avis doit surtout être mis sur la formation et l’encadrement de l’armée, un peu comme avec les unités du Bir (Bataillon d’intervention rapide),  que sur des interventions ponctuelles. Je crois que c’est là où il faudrait que nous sollicitions véritablement un soutien de la France.  Au lieu que dès lors que l’on nous attaque à gauche et à droite, on implore l’intervention d’un papa qui vient remettre de l’ordre.   Le Cameroun doit avoir les moyens de se défendre.

Comment comprendre l’attitude de certains camerounais qui en même temps déplorent l’ingérence de la France et implore son intervention sur ces certains dossiers ?

Il y a une espèce de maladresse sur cette façon de faire. Camerounais nationaliste, j’ai de la difficulté à suivre ces gens qui pensent que l’opinion publique en France peut faire l’opinion publique dans un pays africain comme le Cameroun, en 2015.  On peut et on doit se battre pour que justice soit faite et rendue pour tel ou tel autre, pour une situation ou une autre.  Mais crier chaque fois qu’un français a maille à partir avec la justice camerounaise, ça ne me semble pas opérant.  On va finir par donner raison à ceux qui rament à contre courant de toutes les logiques du monde moderne et qui refusent l’idée d’une double nationalité, parce que si le Cameroun se peuplait de franco-camerounais alors nos prisons ne seraient peuplées que d’innocents.  Je tiens à la justice, je veux qu’on rende justice à tous ces camerounais qui pullulent dans nos prisons, certains parfois sans jugement depuis des décennies, mais de grâce si on ne veut pas que par rapport à certains détenus se développe une sorte de rejet, il va falloir faire attention à ne pas laisser confondre le droit à la défense de tout individu et la  logique d’un discours ou d’une attitude néocoloniale. Quand un avocat pérore sur les antennes françaises qu’il a été reçu en audience et que le cas de son client sera au menu des entretiens entre deux chefs d’Etat, nous laissant entendre que ce sera un « veux ou veux pas »,  je pense à Sarkozy ramenant d’un stop au Tchad des prisonniers français, ma fierté camerounaise en prend un coup. Justice pour justice, plaidons pour une justice pour tous, pas pour certains dont la nationalité étrangère a été en plus récemment acquise. Il faut faire attention à ne pas polluer de nobles combats de brouillards inutiles.  

Vous voulez certainement faire allusion à l’affaire Lydienne Eyoum…

J’ai rencontré maitre Eyoum Lydienne une seule fois avec son mari chez un ami, c’est quelqu’un que j’ai trouvé sympathique et son mari est tout aussi sympathique. Donc je serais heureux qu’ils se retrouvent et qu’ils recommencent à vivre leur vie. Mais je dis simplement, pensant aux déclarations de son avocate et même de Thierry Atangana et son comité de libération, que cette manière « nationale » de traiter des problèmes de justice dans un autre pays, comme si nous étions encore à la période coloniale,   ça me pose un problème et ça  pourrait les priver d’un grand courant de sympathie.

Est-ce qu’aujourd’hui on peut cerner une différence entre Paul qui disait qu’il était le meilleur élève de Mitterand, et Paul Biya qui a vu passer Chirac, Sarkozy, Mitterrand et peut-être demain Hollande, peut-il mieux résister aux diktats de la France ?  

Il y a une certaine gauche en France à qui la longévité du président Paul Biya pose un problème. Hollande s’il ne peut pas écouter cette gauche sur le plan intérieur est obligé de lui donner quand même quelques gages de son passé socialiste sur le plan international. Donc, oui, il y a un problème. Mais il faut vous rendre compte que ce que vous appelez diktat aujourd’hui, et qui était effectif il y a des décennies, devient de moins en moins évident. La politique souterraine de la France à une certaine époque aurait déjà pu libérer quelqu’un comme Lydienne Eyoum. Tout n’est pas heureux dans cet état de fait, mais je le constate, et c’est tout.

Comment faire pour que la relation entre le Cameroun et la France soit gagnant-gagnant ?

Dans le cas de la France, la réalité du terrain nous démontre aujourd’hui que les offres qui sont faites répondent aux lois de la compétitivité par rapport aux chinois. Seulement, nous ne pouvons pas faire entièrement confiance aux Chinois en pensant qu’eux ils soient réglos.  Si vous avez pleins de chantier au Cameroun avec des plaques chinoises ce n’est pas uniquement à cause de leur technicité, c’est aussi parce qu’ils ont des méthodes d’engagement et des dessous de tables qui sont totalement dommageables pour notre pays, avec une politique de la main d’œuvre totalement importée de chez eux,  ce qui est complètement contraire aux intérêts du Cameroun. Mais il faudra que la France, l’Angleterre et les Etats-Unis jouent sur tout ça, et d’ailleurs, quand on voit comment évolue la question de la gestion du port de Kribi, on se dit que les Bolloré ressortent leurs  instincts et leurs armes « chinois ».   La mare aux caïmans grouille de bêtes.

S’il vous était demander de soumettre une demande à François Hollande lors de sa visite au Cameroun, ce serait quoi ?

Je lui demanderais de déclassifier tous les documents sur l’histoire du Cameroun de 1955 à 19971. C’est tout et c’est beaucoup. Ils ont des documents qui peuvent nous permettre d’apprendre notre histoire, de comprendre notre histoire, de nous approprier notre histoire. Et c’est par la réappropriation de son histoire qu’un peuple grandit. La visite d’un président Français au Cameroun n’est pas en elle-même indispensable. On peut vivre 50 ans sans se rendre visite, sans que ça pose de problème. Le problème c’est ce que nous faisons nous-mêmes pour savoir que nous étions un grand peuple, que nous le demeurons, qu’avec des armes fabriquées avec du bois de nos brousses nous combattions des gens qui venaient avec des mitraillettes, et nous les battions. Enseigner aux jeunes camerounais à relire l’histoire du nationalisme camerounais, c’est quelque part prendre deux ou trois siècles d’avance sur la lutte de libération de notre peuple par rapport à l’obscurantisme. Malheureusement aujourd’hui  encore le régime de Yaoundé n’en fait pas son problème.   Et cela justifie des poussées de fièvre qu’on assimile à  une sorte de sentiment anti-français. Peut-être est-ce un moment historique pour le Cameroun. Peut-être cette situation débouchera-t-elle, au lieu d’un sentiment anti-français, sur un salutaire sentiment pro-camerounais, qui nous permette de croire en nous, d’avoir la foi en nous, de construire enfin ce mur qui fonde toute politique d’émancipation durable des peuples.  

Propos recueillis par Georges Alain Boyomo et Daniel Ndjodo Bessala

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